Fipeco

Partager Partage sur Twitter Partage sur Facebook Partage sur Linkedin


FIPECO le 30.06.2023                                

Les fiches de l’encyclopédie                                VIII) Assurances sociales et redistribution

2) Les retraites des salariés du secteur privé

PDF à lire et imprimer

Un « régime » de sécurité sociale est défini par une catégorie de la population et par des règles relatives aux prestations dont cette population bénéficie et aux modalités de leur financement. Il existe ainsi un « régime général » pour les salariés du secteur privé hors agriculture et des régimes pour les non-salariés, les fonctionnaires, les salariés de certaines entreprises publiques comme la RATP, les salariés agricoles…

En matière d’assurance vieillesse, une distinction est opérée entre les « régimes de base » qui versent une « pension de base », ce qui est le cas du « régime général », et les « régimes complémentaires » qui versent une « retraite complémentaire », ce qui est le cas des organismes fédérés par l’Agirc-Arrco dans le secteur privé non agricole. Les régimes complémentaires sont obligatoires comme les régimes de base, mais gérés différemment. Il existe également des retraites supplémentaires qui viennent s’ajouter aux retraites de base et complémentaires. Elles constituent le troisième pilier du système de retraite. Les primes ou cotisations qui y donnent droit sont généralement facultatives mais peuvent être obligatoires à l’intérieur d’une branche ou d’une entreprise. Elles ne sont pas traitées ici.

Cette fiche décrit les principales caractéristiques des régimes de retraite, de base et complémentaires, des salariés du secteur privé non agricole (règles relatives aux pensions et aux cotisations, ainsi qu’à la gestion de ces régimes) avant la réforme de 2023. Deux autres fiches présentent les retraites des fonctionnaires, pour la première, et la situation et les perspectives financières de l’ensemble des régimes de retraite, pour la deuxième.

A) Les pensions de base et les retraites complémentaires

1) La pension de base

Pour avoir droit à une pension, un « âge minimal de départ à la retraite » est requis. Il est de 62 ans depuis 2017 (génération de 1955), après avoir été de 60 ans jusqu’à la réforme de 2010.

La pension annuelle obtenue la première année de la retraite est égale à 50 % (le « taux de liquidation de référence ») du « salaire de référence ». Ce salaire de référence est la moyenne des salaires perçus pendant les 25 années où ils ont été les plus élevés, dans la limite du plafond de la sécurité sociale pour l’année considérée (3 666 € par mois en 2023). Pour comparer les salaires perçus au cours de la carrière, identifier les plus élevés et en faire la moyenne, les salaires gagnés une année N sont multipliés par un coefficient correspondant à l’inflation entre cette année N et l’année de départ en retraite.

a) La proratisation

Si la durée de cotisation (au seul régime général) est inférieure à une durée minimale d’assurance (168 trimestres pour la génération née en 1961 et 172 trimestres pour les générations 1973 et suivantes), le taux de liquidation de référence de 50 % est multiplié par le rapport entre le nombre de trimestres de cotisation au régime général et cette durée minimale (c’est le « coefficient de proratisation »).

b) La décote et la surcote

Dans certaines situations, le calcul de la pension, outre le salaire de référence, le taux de liquidation de référence et le coefficient de proratisation, peut faire intervenir un coefficient supplémentaire, une « décote » ou une « surcote » selon les cas.

Si le salarié prend sa retraite avant 67 ans et avec un nombre de trimestres de cotisation (tous régimes confondus) inférieur à la durée minimale d’assurance (le même nombre de trimestres que pour le coefficient de proratisation), le montant de la pension est réduit par l’application d’une « décote » qui dépend du nombre de trimestres manquants.

Si le nombre de trimestres de cotisation (tous régimes) est supérieur à la durée minimale d’assurance, le montant de la pension est majoré par l’application d’une « surcote » qui dépend du nombre de trimestres de cotisation allant au-delà de la durée minimale de référence et accomplis au-delà de l’âge minimum de liquidation.

c) Les autres paramètres

Certains trimestres pendant lesquels aucune cotisation n’a été versée (périodes de chômage ou d’éducation des enfants, par exemple) peuvent être « validés » et ainsi considérés comme ayant donné lieu à cotisation pour le calcul de la pension (des cotisations sont effectivement versées à la caisse nationale d’assurance vieillesse, au nom du salarié, par d’autres organismes publics).

Le montant de la pension des retraités ayant eu plus de trois enfants est majoré de 10 %. D’autres majorations sont appliquées aux pensions, par exemple pour ceux qui ont besoin d’une tierce personne pour les assister dans certaines conditions.

Les retraités qui ont cotisé au moins 120 trimestres mais dont les revenus, retraites de base et complémentaire, sont inférieurs à 1 310 € reçoivent une pension de base d’au moins 748 € par mois (le « minimum contributif ») en 2022.

Les personnes âgées de plus de 65 ans et dont les ressources sont inférieures à 961 € par mois (pour une personne seule) peuvent, sous certaines conditions (de résidence ou de régularité de séjour), bénéficier de « l’allocation de solidarité aux personnes âgées » (autrefois « minimum vieillesse ») qui leur permet d’atteindre ce niveau de ressources et qui est financée par le « fonds de solidarité vieillesse » (FSV).

La pension de base maximale (hors majorations) correspond à 50 % du plafond de la sécurité sociale, soit 1 833 € par mois.

Après sa « liquidation », c’est-à-dire son versement pour la première fois, la pension de base est revalorisée chaque année en lui appliquant le taux de croissance des prix à la consommation hors tabac.

Le conjoint d’un salarié ou retraité du régime général qui décède peut recevoir une pension de réversion, égale à 54 % de la pension de sa base, à condition que ses ressources annuelles soient inférieures à un plafond (23 442 € en 2023).

2) Les retraites complémentaires

Les salariés qui sont affiliés auprès du régime général le sont également auprès d’un régime complémentaire relevant de l’ARRCO pour les non cadres et de l’AGIRC pour les cadres jusqu’à 2018 et de l’Agirc-Arrco depuis la fusion de ces deux régimes en 2019, ce qui leur donne droit à une retraite complémentaire.

Celle-ci est égale au nombre de « points » acquis par le retraité grâce à ses cotisations (cf. ci-dessous) multiplié par la « valeur de service du point » (1,35 € pour l’Agirc-Arrco en 2023).

La retraite complémentaire ainsi calculée est majorée en fonction du nombre d’enfants nés, élevés ou encore à charge.

Elle est obtenue sans condition de durée d’activité à partir d’un âge qui est celui de l’annulation de la décote dans le régime général (67 ans). Si le salarié part avant cet âge, et au-delà de l’âge minimal du régime général (62 ans), une durée minimale d’assurance est exigée, identique à celle du régime de base. A défaut, un coefficient de minoration est appliqué.

Les partenaires sociaux gestionnaires du régime ont décidé en octobre 2015 de compléter ce dispositif à partir de 2019 par l’application d’un « malus » à ceux qui partent avant 63 ans, même s’ils ont la durée minimale d’assurance requise, et d’un « bonus » à ceux qui partent au-delà de 63 ans[1].

Le conjoint du salarié ou du retraité qui décède peut recevoir une pension de réversion égale à 60 % de la retraite complémentaire, sans condition de ressources.

La retraite complémentaire est revalorisée chaque année, à travers la valeur du point, sur décision des partenaires sociaux qui gèrent l’ARRCO et l’AGIRC, en général sur la base de l’inflation hors tabac.

3) Les pensions moyennes

En 2021, la pension brute de droit direct (hors majorations pour enfants) était de 681 € en moyenne pour le régime général et de 479 € pour l’Agirc-Arrco. Pour les assurés ayant eu une carrière complète dans le même régime, la pension moyenne était de 1 840 € pour les anciens salariés du secteur privé (base et complémentaire).

B) Les cotisations et l’acquisition des points (retraites complémentaires)

1) Le régime général

Les taux des cotisations au régime général au titre de l’assurance vieillesse sont de :

  • 1,9 % (part patronale) et 0,4 % (part salariale) sur la totalité du salaire ;
  • 8,55 % (part patronale) et 6,9 % (part salariale) sur la partie du salaire au-dessous du plafond de la sécurité sociale.

 

2) Les régimes complémentaires

a) L’acquisition des points

Le nombre de points obtenus chaque mois est égal au produit de l’assiette des cotisations par le taux de cotisation, divisé par le « prix d’achat du point » (parfois appelé « salaire de référence »).

L’assiette des cotisations est constituée par le salaire brut, qui est décomposé en « tranches ».

La tranche 1 va jusqu’au plafond de la sécurité sociale (3 666 € par mois) et la tranche 2 va de ce plafond à huit fois son montant.

Le prix d’achat du point est de 17,43 €. Sa revalorisation, ou non, fait chaque année l’objet d’une décision des partenaires sociaux gestionnaires de ces régimes.

b) Les cotisations

Les cotisations sont égales au produit du salaire brut, dans chaque tranche, par le taux de cotisation appliqué dans cette tranche. Les taux de cotisations (total des parts patronale et salariale) sont de 7,87 % dans la tranche 1 et 21,59 % dans la tranche 2.

Il s’y ajoute des « contributions d’équilibre général et d’équilibre technique » qui servent à équilibrer les comptes du régime sans donner droit à des points au taux global de 2,5 % sur la tranche 1 et de 3,05 % sur la tranche 2.

Le « rendement » des régimes complémentaires se définit enfin comme le rapport entre la valeur de service du point (1,35 €) et le prix d’achat du point (17,43 €) majoré par un « taux d’appel des cotisations » (1,27). Il est donc de 6,1 %.

C) La gestion de ces régimes

1) Le régime général

Les prestations d’assurance vieillesse du régime général sont versées à 14,2 millions de retraités (hors pensions de réversion) par un réseau de 16 « caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) » dont la tête est la « caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) ». Ces caisses constituent la « branche retraites » du régime général.

Le Parlement définit dans les lois de financement de la sécurité sociale les objectifs de dépenses et les prévisions de recettes de cette branche. Il détermine aussi les principes selon lesquels sont attribuées et calculées les pensions. Les taux de cotisations relèvent en revanche du pouvoir réglementaire du Gouvernement.

Le Gouvernement et la CNAV signent une « convention d’objectifs et de gestion » (COG) pluriannuelle qui fixent des objectifs de qualité de service et les moyens à mettre en œuvre.

La CNAV est un établissement public administratif de l’Etat sous la tutelle des ministres chargés des affaires sociales et des finances. Elle a un conseil d’administration où siègent 13 représentants des salariés et retraités, 13 représentants des employeurs et 4 personnalités qualifiées. Son directeur général est nommé par décret en conseil des ministres.

Le régime général est un « régime par répartition », ce qui signifie que les pensions versées une année sont, en principe, comptablement équilibrées par les cotisations prélevées la même année sur les salariés en activité et leurs employeurs. Les paramètres de cet équilibre (taux de cotisation, modalités de calcul des pensions…) sont fixés par l’Etat. La CNAV n’a d’autonomie que pour gérer ses dépenses de fonctionnement et son action sociale, dans le cadre de la COG.

2) Les régimes complémentaires

Les régimes AGIRC et ARRCO ont été créés respectivement en 1947 et 1961 par un accord interprofessionnel passé entre les partenaires sociaux pour compléter les pensions servies par le régime général. L’affiliation n’est devenue obligatoire que par une loi de 1972.

Leur gestion est assurée par des « institutions de retraite complémentaire » (IRC) adhérant aux fédérations ARRCO ou AGIRC. Les 37 IRC et leurs fédérations sont des personnes morales de droit privé à but non lucratif régies par le code de la sécurité sociale mais administrées paritairement par des représentants des entreprises et des salariés cotisants aux régimes. Les IRC appartiennent généralement à l’un des 17 « groupes de protection sociale » qui rassemblent également des institutions de prévoyance, des mutuelles ou des organismes d’assurance.

Bien qu’ils constituent des « régimes par points », les régimes complémentaires sont des régimes par répartition au sens où, pour chaque année, les cotisations des actifs financent les pensions de ceux qui sont en retraite. Pour éviter de modifier les paramètres de calcul des cotisations (taux de cotisation…) et des prestations (valeur du point…) chaque fois que cet équilibre entre cotisations et pensions est modifié sous l’effet des fluctuations de la conjoncture économique, l’ARRCO et l’AGIRC ont accumulé des réserves (90 Md€ fin 2022).

Ces paramètres de calcul sont fixés par les partenaires sociaux au sein des conseils d’administration des deux fédérations, qui disposent d’une assez large autonomie. Leurs décisions s’imposent en effet, comme des conventions collectives, aux entreprises adhérentes des organisations d’employeurs signataires. L’Etat intervient néanmoins pour agréer ces décisions et leur donner force obligatoire vis-à-vis des entreprises non adhérentes.

En application de l’accord national interprofessionnel du 30 octobre 2015, l’unification des deux régimes de retraites complémentaires est effective depuis le 1er janvier 2019.

A la fin de 2021, l’AGIRC-ARRCO versait des pensions (hors réversion) à 12,2 millions de retraités.

 

[1] L’accord passé n’utilise pas les termes bonus et malus mais « coefficient de solidarité », celui-ci ne concernant pas les retraites inférieures à un certain seuil. Ce coefficient est appliqué jusqu’à ce que le salarié atteigne l’âge d’annulation de la décote du régime de base.

Revenir en haut de page