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15/02/2023

La durée du travail dans la fonction publique en 2021

François ECALLE

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Ce billet examine la durée du travail, sur l’ensemble de la carrière, des agents de la fonction publique en 2021, en la comparant à celle des salariés du secteur privé. Il s’appuie notamment sur le dernier rapport annuel relatif à l’état de la fonction publique.

La durée annuelle du travail à temps complet dans la fonction publique, hors enseignants, est de 1 612 heures en 2021. Elle est donc supérieure à la durée légale de 1 607 heures mais inférieure de 3 % à celle des salariés du secteur privé.

La durée hebdomadaire habituelle est très proche dans la fonction publique et pour les salariés du secteur privé. Elle est plus élevée dans la fonction publique d’Etat et plus faible dans les deux autres fonctions publiques.

Les fonctionnaires, hors enseignants, ont en moyenne 35 jours de congés et de RTT (41 dans les services de l’Etat, souvent en compensation d’une durée hebdomadaire plus élevée, 32 dans les collectivités locales et 31 dans les hôpitaux) contre 27 pour les salariés du secteur privé (avec de forts écarts selon la taille des entreprises).

Les formes atypiques d’organisation du travail sont plus fréquentes dans le secteur public.

Les absences pour raison de santé y sont également plus nombreuses, notamment dans les collectivités territoriales.

L’âge moyen de liquidation de la retraite est de 63 ans et 8 mois pour les catégories dites « sédentaires » de la fonction publique et de 63 ans dans le régime général des salariés du secteur privé. Il est inférieur à 61 ans pour les catégories dites « actives » de la fonction publique.

Les fonctionnaires qui ont liquidé leur retraite en 2021 ont validé une durée de carrière, tous régimes confondus, d’environ 43 ans, contre un peu moins de 40 ans pour les salariés du secteur privé (régime général).

A) La durée annuelle du travail

Des catégories nombreuses de fonctionnaires ont une organisation du travail particulière (par exemple, les enseignants travaillent en partie chez eux), voire dérogent à la règle des 1 607 heures. Ces régimes spécifiques peuvent être motivés par des sujétions particulières, comme des horaires décalés ou un travail de nuit.

Dans la fonction publique d’Etat, les agents relevant d’une organisation particulière sont majoritaires : enseignants (environ 53 % des effectifs civils des ministères), policiers (8 %), personnels au forfait[1] (14 % des agents et 24 % des cadres hors enseignants des ministères et opérateurs)[2] etc.

Ces régimes et organisations spécifiques ne correspondent pas nécessairement à des durées réelles de travail inférieures à 35 ou 1 607 heures. Si les obligations réglementaires de service des enseignants leur imposent un temps de présence en classe qui est inférieur, ils effectuent de nombreuses heures de travail hors des classes (corrections de copies, réunions avec les élèves et parents…), mais elles ne sont pas soumises à des normes et elles sont moins bien connues.

Certains agents ont des cycles de travail qui les conduisent à être disponibles plus de 35 heures par semaine. Dans ce cas, ils bénéficient de congés supplémentaires (jours de RTT).  Dans une même administration, plusieurs cycles peuvent être offerts aux agents. Un référé de 2020 de la Cour des comptes montre que l’organisation du travail dans la police nationale est d’une très grande complexité.

Certaines formes atypiques d’organisation du travail sont plus fréquentes dans le secteur public que dans le secteur privé (28 % contre 17 % pour le travail le dimanche et 13 % contre 9 % pour le travail de nuit, par exemple).

1) L’évolution de 2006 à 2021 de la durée du travail à temps complet

Selon le rapport annuel sur la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2023, sur la base de l’enquête emploi de l’Insee[3], la durée annuelle du travail à temps complet dans la fonction publique hors enseignants est de 1 612 heures en 2021. Elle est donc supérieure à la durée légale mais inférieure de 3 % à celle des salariés du secteur privée (1 662 heures).

Le rapport sur l’état de la fonction publique exclut les enseignants car ils répondraient mal au questionnaire de l’enquête emploi de l’Insee et y sous-estimeraient la durée réelle de leur travail. D’autres professions du secteur privé répondent sans doute aussi mal à ce questionnaire et cette difficulté méthodologique n’a pas empêché la direction des statistiques du ministère du travail (DARES) de publier une durée annuelle du travail à temps complet dans la fonction publique en y incluant les enseignants jusqu’en 2020. Elle était de 1 577 heures en 2019 contre 1 711 heures pour les salariés du secteur privé, soit un écart de 8 %. Elle est passée à 1 553 heures en 2020 contre 1 587 heures dans le privé mais l’année 2020 est très particulière en raison des mesures de restriction de l’activité.

Sources : rapport annuel sur l’état de la fonction publique et Insee ; FIPECO.

2) La durée du travail à temps complet en 2021

Le rapport annuel sur l’état de la fonction publique présente notamment la durée annuelle, la durée hebdomadaire habituelle et le nombre de journées de congés ou de RTT pour chacune des trois fonctions publiques.

La durée du travail en 2021

Salariés secteur privé

Secteur public

(2019)

Secteur public hors enseignants

Etat hors enseignants

Collectivités locales

Hôpitaux

Heures annuelles

1 662

1 577

1 612

1 661

1 579

1 605

Heures hebdomadaires habituelles

38,9

ND

39,0

40,3

38,2

38,7

Jours de congé et RTT

27

ND

35

41

32

31

Source : rapport sur l’état de la fonction publique de 2022, Insee, DARES, FIPECO

NB les jours de congés sont décomptés en jours ouvrés (soit 5 par semaine) alors qu’ils sont parfois décomptés en jours ouvrables (soit 6 par semaine). La durée hebdomadaire est une durée habituelle sans événements tels que jours fériés, congés, arrêts pour maladie… ni heures supplémentaires exceptionnelles. La durée annuelle est réduite du fait des congés (y compris pour maladie), jours de RTT et jours fériés et augmentée des heures supplémentaires exceptionnelles. Les heures annuelles et hebdomadaires sont celles des seuls salariés à temps complet ; les jours de congés et RTT sont ceux de tous les salariés et ne comprennent pas les congés pour maladie.

La durée annuelle du travail est supérieure à la durée légale de 1 607 heures dans la fonction publique d’Etat, hors enseignants, et inférieure à celle-ci dans la fonction publique territoriale. Dans les services de l’Etat, elle est identique à celle du secteur privé.

La durée hebdomadaire habituelle du travail est en moyenne assez proche dans les secteurs public (hors enseignants) et privé. Celle des fonctionnaires de l’Etat est un peu plus élevée et celle des fonctionnaires territoriaux un peu plus faible que dans le secteur privé.

L’écart avec la durée annuelle du secteur privé résulte surtout des jours de congés et de RTT (jours de congés compensant une durée hebdomadaire supérieure à 35 heures).

Les agents de la fonction publique d’Etat, hors enseignants, ont pris en moyenne 41 jours de congé et de RTT en 2021, les fonctionnaires territoriaux 32 jours et les fonctionnaires hospitaliers 31 jours, contre 27 jours pour les salariés du secteur privé. Les jours de congés et de RTT sont donc nettement plus nombreux dans les fonctions publiques, notamment de RTT pour celle d’Etat et de congé pour la territoriale, que dans le secteur privé. On peut toutefois noter qu’il existe une grande disparité entre les entreprises privées, le nombre de jours de congés étant en 2019 de 25 dans celles de 1 à 9 salariés et de 32 dans celles de 500 salariés et plus.

Les cadres et professions intellectuelles supérieures ont une durée annuelle de travail de 1 800 heures, les professions intermédiaires de 1 547 heures et les ouvriers et employés de 1 582 heures dans l’ensemble des trois fonctions publiques.

Il est parfois noté que les agents publics ont plus de jours de RTT parce que la contrepartie de durées hebdomadaires supérieures à 35 heures prend plus souvent la forme de jours de RTT que de compensation salariale dans le secteur public. Cette observation n’est cependant pas documentée.

Si certains fonctionnaires (policiers, aides-soignants…) ont une durée annuelle du travail inférieure à la durée légale pour compenser des astreintes particulières, notamment le travail de nuit, ils font souvent aussi partie des « catégories actives » de la fonction publique dont l’âge de départ à la retraite est inférieur de 5 à 10 ans à l’âge de droit commun pour compenser ces mêmes contraintes.

S’agissant des enseignants, selon une enquête publiée en octobre 2022 par la direction de l’évaluation du ministère de l’éducation nationale, leur durée hebdomadaire habituelle de travail à temps complet (y compris chez eux pour préparer les cours, corriger les copies…) est de 42,8 heures (médiane) et ils travaillent 35 jours sur les 80 jours de congés scolaires (16 semaines de 5 jours).

Les collectivités locales se distinguent par une durée annuelle du travail inférieure à la durée légale, ce qui pourrait résulter pour partie d’un grand nombre de jours de congés hors RTT. Une enquête de la Cour et des chambres régionales des comptes dans 103 collectivités publié en 2016 a mis en évidence une durée annuelle de 1 562 heures. Le nombre de jours de congé hors RTT est important sous l’effet notamment d’autorisations d’absence accordées localement (« jours du maire » et congés pour événements familiaux, par exemple).

3) Les heures supplémentaires

La durée hebdomadaire habituelle moyenne du travail à temps complet dans le secteur public (39,0 heures hors enseignants) est supérieure à 35 heures, ce qui signifie que beaucoup d’agents effectuent des heures supplémentaires (90 heures par an dans la fonction publique contre 57 dans le secteur privé) qui donnent droit à une rémunération spécifique, calquée sur celle en vigueur dans le secteur privé, ou bénéficient de « journées de RTT ». Il en résulte un nombre de jours de congé nettement supérieur à 25.

Il existe en pratique de nombreux régimes particuliers pour la prise en compte des heures supplémentaires, comme pour la durée hebdomadaire elle-même, qui sont d’une grande diversité et qui n’ont jamais été complètement recensés.

Dans l’enseignement du second degré, les obligations de service sont de 15 heures de cours pour les professeurs agrégés et 18 heures pour les professeurs certifiés. Des « heures supplémentaires années » s’y ajoutent si leur horaire hebdomadaire est supérieur à ces obligations tout au long de l’année. Il existe aussi des « heures supplémentaires effectives » de caractère ponctuel (par exemple, le remplacement d’un collègue pendant quelques semaines).

4) Le travail à temps partiel

Les agents à temps partiel représentent 25 % des fonctionnaires titulaires de l’Etat hors enseignants, 21 % des territoriaux et 22 % des hospitaliers en 2020. Près de 50 % d’entre eux ont une durée du travail égale à 80 ou 90 % de la durée de référence. Les contractuels sont plus souvent à temps partiel (43 % pour la FPE, 46 % pour la FPT et 24 % pour la FPH).

5) L’absentéisme

Les données disponibles sur l’absentéisme dans la fonction publique sont lacunaires, hétérogènes et parfois incohérentes. Quelques indications à prendre avec précaution peuvent néanmoins en être tirées.

Selon le rapport de 2022 sur l’état de la fonction publique, 5 % des fonctionnaires (toutes fonctions publiques, dont 4 % pour l’Etat et 7 % pour les collectivités territoriales et les hôpitaux), ont été absents pour raison de santé au moins un jour au cours d’une semaine donnée en 2021 (5 % dans le secteur privé). Le nombre moyen de jours d’absence pour raison de santé dans l’année est de 12,5 dans la fonction publique (10,2 pour l’Etat, 14,9 pour les collectivités locales et 15,5 pour les hôpitaux) et de 11,5 dans le secteur privé.

Ces statistiques, tirées des réponses des ménages à l’enquête de l’Insee sur l’emploi, sont les plus fiables pour comparer chaque année les absentéismes public et privé. Une enquête moins fréquente sur les conditions de travail apporte des informations complémentaires. Elle montre que 36 % des fonctionnaires ont eu au moins un arrêt de travail pour maladie en 2016, avec peu d’écarts entre les trois fonctions publiques, contre 30 % dans le secteur privé.

Une analyse des facteurs explicatifs des arrêts maladie, présentée dans le rapport sur l’état de la fonction publique de 2015, montre que, toutes choses égales par ailleurs c’est-à-dire en tenant compte par exemple de l’état de santé effectif des agents et des conditions de travail, la probabilité d’avoir un arrêt maladie dans l’année est plus élevée dans les fonctions publiques territoriale et d’Etat que dans le secteur privé et la fonction publique hospitalière.

B) La durée de la carrière professionnelle

Une fiche de l’encyclopédie sur ce site présente les principales caractéristiques des pensions de retraite des fonctionnaires, notamment de leurs modalités de calcul.

1) L’âge de liquidation de la retraite

Selon le rapport sur les pensions des fonctionnaires annexé au projet de loi de finances pour 2023, l’âge moyen des personnes qui ont liquidé leur retraite en 2021 était de 62 ans et 1 mois dans la fonction publique civile d’Etat (FPE), de 61 ans et 11 mois dans la fonction publique territoriale (FPT), de 60 ans et 7 mois dans la fonction publique hospitalière (FPH) et de 62 ans et 11 mois dans le régime général des salariés du secteur privé.

Il existe toutefois une importante différence dans la fonction publique entre les catégories dites « actives » ou « super actives » et « sédentaires ». Les fonctionnaires actifs ou super-actifs appartiennent à des « corps » qui ont été classés en catégorie active ou super-active parce que les emplois concernés « présentent un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » selon le code des pensions civiles et militaires.

Les super-actifs de la FPE (police nationale, services pénitentiaires et contrôle aérien) étaient environ 150 000 en 2020. Les actifs de la FPE (douaniers…) étaient environ 16 000 ; ceux de la FPT étaient en nombre indéterminé mais pourraient être 550 000 (pompiers, policiers municipaux et surtout adjoints techniques et agents de maîtrise mais il est impossible de les distinguer dans les statistiques) ; ceux de la FPH (aides-soignants, une partie des infirmiers, ouvriers et agents d’entretien…) pourraient être 400 000 mais il est également impossible de les distinguer dans les statistiques.

L’âge minimal d’ouverture des droits à la retraite est identique pour les sédentaires et les salariés du secteur privé. Il était inférieur de 5 ans à celui des sédentaires pour les actifs et de 10 ans pour les super-actifs en 2010, sous réserve d’une durée minimale de services (respectivement 17 et 25 ans). La hausse de deux ans qui est prévue par la réforme de 2010 leur est appliquée avec un décalage dans le temps par rapport au secteur privé et aux sédentaires.

La durée minimale de cotisation requise a été relevée comme pour les sédentaires et les salariés du secteur privé en application des dernières réformes de l’ensemble des régimes, mais avec un décalage de trois à huit générations. Le nombre de trimestres de cotisation validés est en outre parfois « bonifié », par exemple à hauteur d’un cinquième pour les catégories super-actives de la fonction publique d’Etat.

Des règles spécifiques s’appliquent également aux militaires s’agissant de l’âge minimal pour liquider la pension et des bonifications de durée d’assurance. Leur âge moyen de liquidation de la retraite est 49 ans et 2 mois en 2021 (première mise en paiement).

Les âges moyens de liquidation de la retraite sont plus élevés pour les sédentaires de la fonction publique que pour les salariés du secteur privé (régime général). En revanche, ils sont plus faibles et inférieurs à 61 ans pour les actifs de la fonction publique.

Les âges moyens de liquidation de la retraite en 2021

Salariés du privé

Etat (civils)

Collectivités locales

Hôpitaux

Sédentaires

Actifs

Super actifs

Sédentaires

Actifs

Sédentaires

Actifs

62 ans 11 mois

63 ans 8 mois

60 ans 6 mois

57 ans 6 mois

63 ans 5 mois

60 ans 7 mois

62 ans 0 mois

59 ans 10 mois

Source : rapport sur les pensions des fonctionnaires annexé au projet de loi de finances pour 2023.

2) La durée de la carrière

Les fonctionnaires qui ont liquidé leur retraite en 2021 ont validé une durée de carrière, tous régimes confondus, de 172 trimestres pour les agents civils de l’Etat et pour les agents des collectivités locales et de 173 trimestres pour ceux des hôpitaux, contre 160 trimestres pour les salariés du secteur privé (régime général) en 2020. Les nouveaux retraités de la fonction publique ont donc validé une carrière plus longue bien qu’ils aient liquidé leur retraite plus tôt que les salariés du secteur privé.

Les médias suivant on mentionné cet article :

Le Figaro

Acteurs publics

 

[1] Qui ne sont pas astreints à une durée hebdomadaire en heures mais à un nombre de jours de travail dans l’année.

[2] Les agents au forfait ont droit à 20 jours de « congés RTT » en plus des congés légaux pour compenser l’absence de décomptes hebdomadaires.

[3] Elle repose sur les déclarations des salariés mais, selon la DARES, les durées annuelles qui en sont tirées sont la meilleure référence, les durées déclarées par les employeurs étant souvent collectives et théoriques.

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