19/03/2025
Les prélèvements sur le travail, le capital et la consommation de 2016 à 2023
François ECALLE
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Les économistes distinguent souvent les prélèvements obligatoires (PO) sur la consommation et sur les deux facteurs de production que sont le travail et le capital. La ventilation des PO entre ces trois assiettes économiques pose des problèmes méthodologiques délicats qui sont présentés dans les fiches techniques de ce site relatives aux prélèvements sur le travail et sur le capital. Elle est néanmoins effectuée chaque année par la Commission européenne, dans le cadre de son rapport sur les tendances de la fiscalité dans l’Union européenne, et ce billet s’appuie sur les dernières statistiques qu’elle a mises en ligne. Il compare les PO en France, en Allemagne, dans la zone euro et l’Union européenne en 2023, dernière année connue, et en 2016, avant le premier mandat présidentiel d’Emmanuel Macron.
Le taux des PO en France en 2023 est supérieur de 4,3 points de PIB à celui de la zone euro, de 4,8 points à celui de l’Union européenne et également de 4,8 points à celui de l’Allemagne.
L’écart par rapport à la moyenne de l’Union européenne résulte pour 2,7 points de PIB des prélèvements sur le travail, pour 1,9 points des prélèvements sur le capital et pour 0,3 point des prélèvements sur la consommation.
Le taux des prélèvements obligatoires a diminué de 2,0 points de PIB en France de 2016 à 2023, soit plus que la moyenne de la zone euro (0,6 point) et de l’Union européenne (0,8 point) ou encore de l’Allemagne (0,2 point).
De 2016 à 2023, en pourcentage du PIB, les prélèvements sur le travail ont nettement diminué en France et plus légèrement en moyenne dans l’Union européenne alors qu’ils ont augmenté en Allemagne. Malgré les dernières réformes fiscales, les prélèvements sur le capital sont restés à peu près stables en pourcentage du PIB en France alors qu’ils ont légèrement augmenté en moyenne dans la zone euro ou l’Union européenne ainsi qu’en Allemagne. Les prélèvements sur la consommation ont diminué en France, à peu près comme dans la moyenne des pays européens. Ils ont un peu plus baissé en Allemagne.
La France est passée du deuxième rang de l’Union européenne pour les prélèvements sur le travail en 2016 au quatrième en 2023, mais elle est restée au premier rang pour ceux qui sont à la charge des employeurs.
S’agissant des prélèvements sur le capital, la France est passée du troisième rang en 2016 au quatrième rang en 2023, mais reste loin devant l’Allemagne. Elle est encore au premier rang pour les impôts sur le stock de capital en 2023.
Elle est passée du 14ème rang en 2016 au 18ème en 2023 pour les prélèvements sur la consommation.
Si on examine la répartition des prélèvements obligatoires en pourcentage du total en 2023, il apparait que la part des prélèvements sur la consommation en France est inférieure à la moyenne des pays européens, que la part des prélèvements sur le travail y est assez proche de la moyenne et que la part des prélèvements sur le capital y est plus élevée. En Allemagne, la part du travail est nettement plus forte qu’en France, la part de la consommation est un peu plus élevée et la part du capital est bien plus faible.
A) La répartition des prélèvements par assiette économique
1) Les prélèvements par assiette en pourcentage du PIB
Le taux des prélèvements obligatoires (PO) estimé pour la France en 2023 par la Commission européenne (43,8 %) n’est pas exactement le même que celui estimé par l’Insee (43,2 %) en raison notamment d’un traitement différent des crédits d’impôts[1]. Il diffère aussi de celui qui est publié par Eurostat (45,6 %) car ce dernier inclut les cotisations sociales dites « imputées » que l’Etat employeur se verse à lui-même au titre du financement des retraites de ses agents.
Le taux des PO en 2023 retenu par la Commission est supérieur de 4,3 points de PIB à celui de la zone euro, de 4,8 points à celui de l’Union européenne et également de 4,8 points à celui de l’Allemagne.
Le taux des PO a diminué de 2,0 points de PIB en France de 2016 à 2023, soit nettement plus que la moyenne de la zone euro (0,6 point) et de l’Union européenne (0,8 point) ou encore de l’Allemagne (0,2 point).
L’écart par rapport aux moyennes communautaires en 2023 résulte pour environ 2,5 points de PIB des prélèvements sur le travail, pour presque 2,0 points des prélèvements sur le capital et pour un peu moins de 0,5 point des prélèvements sur la consommation.
Les prélèvements obligatoires par assiette économique en % du PIB
Prélèvements
|
France
|
Allemagne
|
Zone euro
|
Union européenne
|
|
2016
|
2023
|
2016
|
2023
|
2016
|
2023
|
2016
|
2023
|
Total
|
45,7
|
43,8
|
39,2
|
39,0
|
40,1
|
39,5
|
39,8
|
39,0
|
Travail
|
24,0
|
22,7
|
21,5
|
22,0
|
20,7
|
20,5
|
20,4
|
20,0
|
Capital
|
10,3
|
10,4
|
6,8
|
7,1
|
8,3
|
8,7
|
8,1
|
8,5
|
Consommation
|
11,5
|
10,8
|
10,9
|
9,8
|
11,1
|
10,3
|
11,3
|
10,5
|
Source : Commission européenne ; FIPECO.
De 2016 à 2023, les prélèvements sur le travail ont diminué en France, en points de PIB, en raison notamment de la substitution de la CSG à des cotisations salariales et, surtout, du remplacement du CICE (considéré comme une dépense publique dans les statistiques européennes comme tous les crédits d’impôt) par un allègement de cotisations patronales (l’impact est d’environ 0,9 point de PIB). Ils ont légèrement baissé dans la zone euro et l’Union européenne alors qu’ils ont augmenté en Allemagne.
Malgré les réformes fiscales de ces dernières années (remplacement de l’ISF par l’IFI, baisse du taux de l’IS, prélèvement forfaitaire unique sur les revenus des placements financiers…), les prélèvements sur le capital sont restés à peu près stables en pourcentage du PIB en France de 2016 à 2023. Ils ont légèrement augmenté en moyenne dans la zone euro ou l’Union européenne ainsi qu’en Allemagne.
Les prélèvements sur la consommation ont diminué en France de 2016 à 2023, à peu près comme dans la moyenne des pays européens. Ils ont un peu plus baissé en Allemagne.
2) Les prélèvements par assiette en pourcentage du total des prélèvements obligatoires
Les prélèvements par assiette économique en 2022 en % du total
Prélèvements
|
France
|
Allemagne
|
Zone euro
|
Union européenne
|
Total
|
100
|
100
|
100
|
100
|
Travail
|
51,7
|
56,6
|
51,8
|
51,2
|
Capital
|
23,6
|
18,3
|
22,1
|
21,9
|
Consommation
|
24,6
|
25,1
|
26,1
|
26,9
|
Source : Commission européenne ; FIPECO.
La part des prélèvements sur la consommation dans le total des PO en France est inférieure à la moyenne des pays européens. La part des prélèvements sur le travail est assez proche. La part des prélèvements sur le capital est plus élevée. En Allemagne, la part du travail est nettement plus forte qu’en France, la part de la consommation est un peu plus élevée et la part du capital est bien plus faible.
B) Les prélèvements sur le travail
Les prélèvements obligatoires sur le travail représentent 22,7 % du PIB en France en 2023 contre une moyenne de 20,5 % dans la zone euro et de 20,0 % dans l’Union européenne. La France est passée du deuxième rang dans l’Union européenne en 2016, derrière la Suède, au quatrième rang en 2023 derrière le Danemark (23,7 %), la Suède (23,6 %) et l’Autriche (23,6 %). Le ratio allemand est de 22,0 %.
Source : Commission européenne ; FIPECO
La France se distingue encore en 2023 par le poids des prélèvements dont les employeurs sont redevables (11,9 % du PIB) malgré les allègements de cotisations patronales qui ont remplacé le CICE : elle est restée au premier rang, comme en 2016, loin devant l’Allemagne (6,8 %) et les moyennes de la zone euro (8,2 %) et de l’Union européenne (7,9 %).
Les prélèvements sur le travail à la charge des employeurs en 2023 (% du PIB)
France
|
Allemagne
|
Italie
|
Espagne
|
Pays-Bas
|
11,9
|
6,8
|
9,3
|
9,4
|
5,1
|
Belgique
|
Zone euro
|
Suède
|
Pologne
|
Union européenne
|
7,7
|
8,2
|
11,6
|
5,3
|
7,9
|
Source : Commission européenne ; FIPECO
C) Les prélèvements sur le capital
Les prélèvements obligatoires sur le capital (physique, notamment immobilier, et financier) représentent 10,4 % du PIB en France en 2023 contre une moyenne de 8,7 % dans la zone euro et 8,5 % dans l’Union européenne. La France est passée du troisième rang en 2016, derrière notamment la Belgique, au quatrième rang en 2023, derrière notamment la Belgique de nouveau et l’Italie mais loin devant l’Allemagne (7,1 %).
Source : Commission européenne ; FIPECO
Les prélèvements sur le capital comprennent des prélèvements sur ses revenus (IR, CSG…) et sur son stock, c’est-à-dire sa détention (taxes foncières, ISF/IFI…) et sa transmission (droits de mutation à titre gratuit ou onéreux).
La France se distingue notamment par le poids des prélèvements sur le stock de capital (4,0 % du PIB en 2023) pour lesquels elle se situe au premier rang, comme en 2016. Elle reste très loin de l’Allemagne (1,1 %) et loin des moyennes de la zone euro (2,3 %) et de l’Union européenne (2,2 %).
Les prélèvements sur le stock de capital en 2023 (% du PIB)
France
|
Allemagne
|
Italie
|
Espagne
|
Pays-Bas
|
4,0
|
1,1
|
2,4
|
3,0
|
1,5
|
Belgique
|
Zone euro
|
Suède
|
Pologne
|
Union européenne
|
3,8
|
2,3
|
1,2
|
2,5
|
2,2
|
Source : Commission européenne ; FIPECO
D) Les prélèvements sur la consommation
Les prélèvements obligatoires sur la consommation représentent 10,8 % du PIB en France en 2023 pour des moyennes de 10,3 % dans la zone euro et de 10,5 % dans l’Union européenne. La France est au 18ème rang de l’Union (le 14ème en 2016). Parmi les grands pays de l’Union, la Suède et la Pologne ont un ratio plus élevé. En Allemagne, ces prélèvements ne représentent que 9,8 % du PIB.
Les impôts sur la consommation constituent 24,6 % des prélèvements obligatoires en France, ce qui la situe au 25ème rang de l’Union européenne.

Source : Commission européenne ; FIPECO
La TVA est le principal prélèvement sur la consommation. Son rendement rapporté au PIB en France en 2023 (7,3 %) est proche de la moyenne de la zone euro (7,0 %) ou de l’Union européenne (7,1 %). La France est au 18ème rang de l’Union en 2023 après avoir été au 17ème en 2016. Parmi les grands pays européens, la Suède affiche un ratio bien plus élevé. Presque tous les pays de moindre importance que ceux figurant dans ce tableau ont un ratio plus élevé.
La TVA en 2023 (% du PIB)
France
|
Allemagne
|
Italie
|
Espagne
|
Pays-Bas
|
7,3
|
6,8
|
6,6
|
6,4
|
7,1
|
Belgique
|
Zone euro
|
Suède
|
Pologne
|
Union européenne
|
6,3
|
7,0
|
8,9
|
7,3
|
7,1
|
Source : Commission européenne ; FIPECO
Les médias suivants ont mentionné cette note :
Les Echos
Le Point
[1] Ils sont traités comme des dépenses publiques et ne sont donc pas déduits des prélèvements obligatoires par la Commission européenne, alors que l’Insee les en déduit.