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12/12/2024

La durée du travail dans la fonction publique en 2023

François ECALLE

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Ce billet examine la durée du travail, sur une année et sur la carrière, des agents de la fonction publique en 2023, en la comparant à celle des salariés du secteur privé. La durée annuelle légale est de 1 607 heures pour les fonctionnaires comme pour les salariés du secteur privé.

La durée annuelle du travail à temps complet dans la fonction publique en 2023 est en moyenne de 1 634 heures en excluant les enseignants et de 1 582 heures en les incluant. Elle est de 1 695 heures pour les salariés du secteur privé.

Depuis 2006, la durée annuelle du travail à temps complet des salariés du secteur privé est assez stable, autour de 1 700 heures, si on excepte les années 2020 et 2021. Celle des fonctionnaires est légèrement croissante, notamment sur ces dernières années, et n’est plus très loin de la durée légale. La loi de 2019 qui prévoit la suppression des régimes dérogatoires à la durée légale pourrait y avoir contribué.

Les données plus précises qui suivent sur la durée annuelle du travail ne sont disponibles que pour les fonctionnaires hors enseignants.

La durée hebdomadaire habituelle des fonctionnaires est en moyenne identique à celle des salariés du secteur privé (39,0 heures). Elle est plus élevée dans la fonction publique d’Etat et un peu plus faible dans les deux autres fonctions publiques.

Les fonctionnaires ont en moyenne 33 jours de congés et de RTT (37 dans les services de l’Etat, 30 dans les collectivités locales et 27 dans les hôpitaux) contre 26 pour les salariés du secteur privé.

Les formes atypiques d’organisation du travail sont plus fréquentes dans le secteur public.

Les absences pour raison de santé y sont également plus nombreuses, notamment dans les fonctions publiques territoriales et hospitalières.

L’âge moyen de liquidation de la retraite en 2023 est de 63 ans et 8 mois pour les catégories dites « sédentaires » de la fonction publique et de 63 ans et 5 mois pour les salariés du secteur privé dans le régime général. Il est inférieur ou égal à 61 ans pour les catégories dites « actives » de la fonction publique.

Les fonctionnaires qui ont liquidé leur retraite en 2023 ont validé une durée de carrière, tous régimes confondus, de plus de 43 ans, contre 40 ans pour les salariés du secteur privé.

A) La durée annuelle du travail

1) La durée annuelle à temps complet en 2023

La durée annuelle légale du travail est de 1 607 heures pour les fonctionnaires comme pour les salariés du secteur privé.

Selon la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail (Dares), la durée annuelle du travail à temps complet est de 1 582 heures en 2023 dans la fonction publique en incluant les enseignants et de 1 634 heures en les excluant, contre 1 695 heures pour les salariés du secteur privé.

Selon le rapport publié en novembre 2024 sur l’état de la fonction publique par le service statistique du ministère en charge de celle-ci, la durée annuelle du travail à temps complet des fonctionnaires est en moyenne de 1 632 heures en 2023, hors enseignants, contre 1 698 heures pour les salariés du secteur privé, soit un écart de 3,9 %, sur la base d’une exploitation de l’enquête emploi de l’Insee[1].

Le service statistique du ministère de la fonction publique exclut les enseignants de son estimation de la durée du travail car il considère que leur temps de travail est particulièrement difficile à mesurer et que leurs réponses à l’enquête emploi de l’Insee ne sont pas cohérentes avec leurs réponses à une autre enquête exploitée par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) du ministère de l’Education Nationale.

Leur durée hebdomadaire habituelle à temps complet (y compris chez eux pour préparer les cours, corriger les copies…) en 2018 est estimée à 43 heures (médiane) hors vacances scolaires dans une publication d’octobre 2022 de la DEPP. Il y apparaît également qu’ils travaillent 35 jours sur les 80 jours de congés scolaires (16 semaines de 5 jours) mais la durée travaillée chaque jour pendant ces périodes de congé n’est pas précisée.

Les données plus précises qui sont présentées ci-dessous, tirées du rapport du service statistique du ministère de la fonction publique, ne concernent que les fonctionnaires hors enseignants.

La durée annuelle du travail est supérieure à la durée légale de 1 607 heures dans les fonctions publiques d’Etat et hospitalière. Elle lui est légèrement inférieure dans la fonction publique territoriale. Dans les services de l’Etat, elle est presque égale à celle des salariés du secteur privé.

La durée hebdomadaire habituelle du travail est en moyenne identique dans les secteurs public et privé. Celle des fonctionnaires de l’Etat est un peu plus élevée et celle des fonctionnaires territoriaux plus faible que celle des salariés du secteur privé.

Les heures supplémentaires qui apparaissent dans le tableau suivant sont celles qui sont effectuées au-delà de la durée légale, ou de la durée prévue par l’employeur si elle en diffère, sur une semaine de référence extrapolée sur l’année. Elles sont plus nombreuses dans les services de l’Etat et dans les hôpitaux que dans le secteur privé, moins nombreuses dans les collectivités locales.

L’écart avec la durée annuelle du secteur privé résulte surtout des jours de congés et de RTT (jours de congés compensant une durée hebdomadaire supérieure à 35 heures).

Les agents de la fonction publique d’Etat ont pris en moyenne 37 jours de congé et de RTT en 2023, les fonctionnaires territoriaux 30 jours et les fonctionnaires hospitaliers 27 jours, contre 26 jours pour les salariés du secteur privé. Les jours de congés et de RTT sont donc plus nombreux dans les fonctions publiques que dans le secteur privé. S’agissant de l’Etat, ce sont pour une bonne part des jours de RTT qui compensent une durée hebdomadaire habituelle plus élevée que dans le secteur privé. On peut aussi noter qu’il existe une grande disparité entre les entreprises privées : le nombre de jours de congés était de 25 dans celles de 1 à 9 salariés et de 32 dans celles de 500 salariés et plus en 2019.

La durée du travail en 2023

Salariés secteur privé

Secteur public

Secteur public hors enseignants

Etat hors enseignants

Collectivités locales

Hôpitaux

Heures annuelles

1 698

1 582

1 634

1 684

1 599

1 622

Heures hebdomadaires habituelles

39,0

ND

39,0

40,5

38,2

38,7

Heures supplémentaires dans l’année

42,0

ND

54,7

72,0

36,0

54,0

Jours de congé et RTT

25,5

ND

33,3

37,1

30,4

27,2

Source : rapport sur l’état de la fonction publique de 2024, Insee, Dares, FIPECO

NB les jours de congés sont décomptés en jours ouvrés (soit 5 par semaine) alors qu’ils sont parfois décomptés en jours ouvrables (soit 6 par semaine). La durée hebdomadaire est une durée habituelle sans événements tels que jours fériés, congés, arrêts pour maladie… ni heures supplémentaires exceptionnelles. La durée annuelle est réduite du fait des congés (y compris pour maladie), jours de RTT et jours fériés et augmentée des heures supplémentaires exceptionnelles. Les heures annuelles et hebdomadaires sont celles des seuls salariés à temps complet ; les jours de congés et RTT sont ceux de tous les salariés et ne comprennent pas les congés pour maladie.

Les cadres et professions intellectuelles supérieures ont une durée annuelle de travail à temps complet de 1 814 heures, les professions intermédiaires de 1 596 heures et les ouvriers et employés de 1 583 heures en moyenne dans l’ensemble des trois fonctions publiques.

Les collectivités locales ont une durée annuelle du travail inférieure à la durée légale, ce qui résulte pour partie du nombre de jours de congés hors RTT. Une enquête de la Cour et des chambres régionales des comptes dans 103 collectivités publiée en 2016 avait mis en évidence une durée annuelle de 1 562 heures. Le nombre de jours de congé hors RTT paraissait important sous l’effet notamment d’autorisations d’absence accordées localement (« jours du maire » et congés pour événements familiaux, par exemple).

Dans son bilan d’étape, publié en novembre 2023, de la loi de transformation de la fonction publique de 2019, la Cour des comptes rappelle qu’elle prévoit une harmonisation des autorisations d’absence pour raison familiale et la suppression des régimes dérogatoires à la durée légale du travail existants dans la fonction publique territoriale, mais aussi dans certains services de l’Etat. Ses investigations la conduisent à observer que « la problématique de l’harmonisation du temps de travail dans la fonction publique demeure et semble connaître des phénomènes de résistance quel que soit le versant de la fonction publique concernée ».

Elle a d’ailleurs publié en janvier 2024 un référé d’octobre 2023 où elle souligne que, malgré ses observations précédentes, la durée annuelle du travail à temps complet des 77 000 agents non enseignants des universités était encore seulement de 1 467 heures en moyenne.

Les données publiées dans le rapport annuel de novembre 2024 sur l’état de la fonction publique font apparaitre une durée annuelle plus proche de la durée légale dans les collectivités locales en 2023, ce qui laisse penser que la loi de 2019 a tout de même eu un impact significatif.

2) L’absentéisme

Les données disponibles sur l’absentéisme dans la fonction publique sont lacunaires, hétérogènes et parfois incohérentes. Quelques indications à prendre avec précaution peuvent néanmoins en être tirées.

Selon le rapport de 2024 sur l’état de la fonction publique, 5,3 % des fonctionnaires (toutes fonctions publiques, dont 3,8 % pour l’Etat hors enseignants, 4,2 % pour les enseignants, 6,6 % pour les collectivités territoriales et 5,9 % pour les hôpitaux), ont été absents pour raison de santé au moins un jour au cours de la semaine précédant l’enquête en 2023 (4,8 % dans le secteur privé).

Le nombre moyen de jours d’absence pour raison de santé dans l’année est de 12,0 dans la fonction publique en 2023 (8,4 pour l’Etat hors enseignants, 9,3 pour les enseignants, 14,7 pour les fonctionnaires territoriaux et 14,0 pour les fonctionnaires hospitaliers) et de 10,3 dans le secteur privé.

Une analyse des facteurs explicatifs des arrêts maladie, présentée dans le rapport sur l’état de la fonction publique de 2015, montrait que, toutes choses égales par ailleurs c’est-à-dire en tenant compte par exemple de l’état de santé effectif des agents et des conditions de travail, la probabilité d’avoir un arrêt maladie dans l’année était plus élevée dans les fonctions publiques territoriale et d’Etat que dans le secteur privé et la fonction publique hospitalière.

3) Les formes atypiques d’organisation du travail

Des catégories nombreuses de fonctionnaires ont une organisation du travail et des sujétions particulières comme des horaires décalés, un travail de nuit ou les travaux effectués par les enseignants à leur domicile.

Ces régimes et organisations spécifiques ne correspondent pas nécessairement à des durées réelles de travail inférieures à 35 ou 1 607 heures. Si les obligations réglementaires de service des enseignants leur imposent un temps de présence en classe qui est inférieur, ils effectuent de nombreuses heures de travail hors des classes (corrections de copies, réunions avec les élèves et parents…), mais elles ne sont pas soumises à des normes et elles sont moins bien connues.

Certains agents ont des cycles de travail qui les conduisent à être disponibles plus de 35 heures par semaine. Dans ce cas, ils bénéficient de congés supplémentaires (jours de RTT).  Dans une même administration, plusieurs cycles peuvent être offerts aux agents. Un référé de 2020 de la Cour des comptes montre que l’organisation du travail dans la police nationale est ainsi d’une très grande complexité.

Certaines formes atypiques d’organisation du travail sont plus fréquentes dans le secteur public que dans le secteur privé (31 % contre 18 % pour le travail le dimanche et 33 % contre 26 % pour le travail en soirée, par exemple). Le télétravail concerne une part plus faible des salariés dans le public (16 %) que dans le privé (23 %).

Les agents à temps partiel représentent 9 % des fonctionnaires titulaires de l’Etat, 17 % des territoriaux et 19 % des hospitaliers en 2023. Près de 50 % d’entre eux ont une durée du travail égale à 80 ou 90 % de la durée de référence. Les contractuels sont plus souvent à temps partiel (27 % pour la fonction publique d’Etat, 40 % pour la territoriale et 25 % pour l’hospitalière).

4) La durée annuelle à temps complet de 2006 à 2023

Si on excepte les années 2020 et 2021, la durée annuelle du travail à temps complet des salariés du secteur privé est assez stable, autour de 1 700 heures. Celle des fonctionnaires est légèrement croissante, notamment depuis quelques années, et se rapproche de la durée légale (enseignants inclus) ou la dépasse (enseignants exclus) en 2023. Cette évolution n’est sans doute pas sans rapport avec la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 qui a prévu la suppression des régimes dérogatoires permettant une durée du travail inférieure à la durée légale.

Sources : Dares ; FIPECO. Les données publiées par la direction générale de l’administration et de la fonction publique sont légèrement différentes de celles de la DARES.

B) La durée de la carrière professionnelle

Une fiche de l’encyclopédie sur ce site présente les principales caractéristiques des pensions de retraite des fonctionnaires, notamment de leurs modalités de calcul.

1) L’âge de liquidation de la retraite

Selon le rapport sur les pensions des fonctionnaires annexé au projet de loi de finances pour 2025, l’âge moyen à la liquidation de la retraite en 2023 était de 62 ans et 4 mois dans la fonction publique civile d’Etat (FPE), de 62 ans et 2 mois dans la fonction publique territoriale (FPT), de 60 ans et 10 mois dans la fonction publique hospitalière (FPH) et de 63 ans et 5 mois dans le régime général des salariés du secteur privé.

Il existe toutefois une importante différence dans la fonction publique entre les catégories dites « actives » ou « super actives » et « sédentaires ». Les fonctionnaires actifs ou super-actifs appartiennent à des « corps » qui ont été classés en catégorie active ou super-active parce que les emplois concernés « présentent un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » selon le code des pensions civiles et militaires.

Les super-actifs de la FPE (police nationale, services pénitentiaires et contrôle aérien) étaient environ 150 000 en 2020. Les actifs de la FPE (douaniers…) étaient environ 16 000 ; ceux de la FPT étaient en nombre indéterminé mais pourraient être 550 000 (pompiers, policiers municipaux et surtout adjoints techniques et agents de maîtrise mais il est impossible de les distinguer dans les statistiques) ; ceux de la FPH (aides-soignants, une partie des infirmiers, ouvriers et agents d’entretien…) pourraient être 400 000 mais il est également impossible de les distinguer dans les statistiques.

L’âge minimal d’ouverture des droits à la retraite est identique pour les sédentaires et les salariés du secteur privé. Il est inférieur d’environ 5 ans à celui des sédentaires pour les actifs et 10 ans pour les super-actifs.

La durée minimale de cotisation requise a été relevée comme pour les salariés du secteur privé. Le nombre de trimestres de cotisation validés est parfois « bonifié », par exemple à hauteur d’un cinquième pour les catégories super-actives de la fonction publique d’Etat.

Des règles spécifiques s’appliquent aux militaires s’agissant de l’âge minimal pour liquider la pension et des bonifications de durée d’assurance. Leur âge moyen de liquidation de la retraite est 45 ans et 9 mois en 2023.

Les âges moyens de liquidation de la retraite sont plus élevés pour les sédentaires de la fonction publique que pour les salariés du secteur privé (régime général). En revanche, ils sont plus faibles et inférieurs à 61 ans pour les actifs de la fonction publique.

Les âges moyens de liquidation de la retraite en 2023

Salariés du privé

Etat (civils)

Collectivités locales

Hôpitaux

Sédentaires

Actifs et super actifs

Sédentaires

Actifs

Sédentaires

Actifs

63 ans 5 mois

63 ans 11 mois

60 ans 2 mois

63 ans 8 mois

61 ans 0 mois

63 ans 1 mois

60 ans 3 mois

Source : rapport sur les pensions des fonctionnaires annexé au projet de loi de finances pour 2025.

2) La durée de la carrière

Les fonctionnaires qui ont liquidé leur retraite en 2023 ont validé une durée de carrière, tous régimes confondus, de 172 trimestres pour les agents civils de l’Etat, de 173 trimestres pour les agents des collectivités locales et de 174 trimestres pour ceux des hôpitaux, contre 159 trimestres pour les retraités du régime général en 2022. Les nouveaux retraités de la fonction publique ont donc validé une carrière plus longue bien qu’ils aient liquidé leur retraite plus tôt que les salariés du secteur privé. Les carrières des salariés du régime général sont en effet plus souvent interrompues.

Les médias suivants ont mentioné cette note :

Le Figaro

[1] Cette enquête repose sur les déclarations des salariés mais, selon le service statistique du ministère du travail, les durées annuelles qui en sont tirées constituent la meilleure référence, les durées déclarées par les employeurs étant souvent collectives et théoriques. Les chiffres publiés par les services statistiques des ministères du Travail et de la Fonction publique sur la base de cette même enquête sont très légèrement différents.

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