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FIPECO le 13.07.2023

Les fiches de l’encyclopédie                                                          VII) Les finances locales

                                                            

 

5) Les différents niveaux de collectivités locales

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Les autres fiches sur les finances locales présentent généralement la situation d’ensemble des « administrations publiques locales » (APUL), qui constituent l’une des catégories des « administrations publiques » de la comptabilité nationale.

Les trois niveaux de collectivités locales (commune et leurs groupements, départements et régions) sont toutefois dans des situations différentes. Les comptes nationaux n’étant pas assez détaillés pour les analyser, il faut s’appuyer sur les comptes des collectivités locales et de leurs groupements, qui sont établis en appliquant leurs règles comptables particulières et agrégés par la direction générale des finances publiques du ministère des finances.

Il existe également une forte disparité des situations au sein de chaque niveau de collectivités, par exemple entre les communes ou départements urbains et ruraux, qui pourrait aussi être analysée. Toutefois, en poussant cette logique jusqu’à ses limites, chaque collectivité est unique et devrait faire l’objet d’une analyse spécifique, ce qui est impossible. Pour en tirer des conclusions opérationnelles, il faut généralement se limiter à des analyses statistiques de catégories suffisamment larges comme les trois niveaux de collectivités locales.

Ces trois niveaux diffèrent sensiblement au regard de leurs compétences, du dynamisme de leurs dépenses, de leur « autonomie fiscale » (qui n’est pas garantie par la Constitution, contrairement à « l’autonomie financière »), de leur besoin de financement et de leur endettement.

A) Les compétences

La loi municipale de 1884 accordait aux communes une « clause générale de compétences », c’est-à-dire une capacité générale d’intervention sur leur territoire sans que leurs attributions doivent être énumérées. Cette clause générale s’oppose au « principe de spécialité » qui régit les établissements publics. Elle avait été étendue aux départements et aux régions en 1982 et, après avoir été supprimée puis rétablie, elle a finalement été supprimée pour ces deux dernières catégories de collectivités par la loi de 2015 sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRE).

Les communes disposent donc de compétences générales (sous réserve des nombreuses compétences exclusivement attribuées à l’Etat) et les exercent en pratique plus particulièrement dans les domaines suivants : urbanisme et logement, avec notamment les permis de construire ; action sociale (crèches, foyers pour personnes âgées…) ; gestion des écoles (hors rémunération des enseignants) ; action culturelle (musées, salles de spectacle…) ; sports et loisirs (équipements sportifs…) ; voirie communale ; protection de l’ordre public à travers les pouvoirs de police du maire.

Certaines de ses compétences peuvent être transférées, obligatoirement ou facultativement selon les cas, aux établissements publics de coopération intercommunale (cf. fiche sur l’intercommunalité).

La loi de 2014 de modernisation de l’action publique territoriale (MAPTAM) donne aux communes un rôle de chef de file, vis-à-vis des autres collectivités et des établissements publics, en matière de mobilité durable, d’organisation des services publics de proximité et d’aménagement de l’espace et de développement local.

Les maires et leurs adjoints exercent en outre certaines fonctions pour le compte de l’Etat (organisation des élections, état civil…).

Les départements sont chefs de file en matière d’aide sociale, d’autonomie des personnes et de solidarité des territoires.

Ils sont plus particulièrement compétents en matière sociale, avec notamment la gestion de plusieurs prestations sociales nationales (revenu de solidarité active, allocation personnelle d’autonomie…) et d’équipements (maisons de retraite…), d’aménagement (voirie départementale, équipement des zones rurales…), de gestion des collèges (hors rémunération des enseignants) et d’action culturelle et sportive (bibliothèques départementales…).

La région est responsable de la définition des orientations en matière de développement économique ; elle élabore le « schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires » ainsi que le « plan régional de prévention et de gestion des déchets » ; elle est responsable de la gestion des services non urbains de transport, avec notamment les trains express régionaux (TER), des lycées (hors rémunération des enseignants) et de la formation professionnelle continue ; elle exerce également des compétences en matière de gestion des ports et aéroports régionaux et de protection du patrimoine.

Les lois NOTRE et MAPTAM avaient pour objectif de simplifier le « mille-feuille » de la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités locales. La nouvelle carte des compétences reste cependant complexe, beaucoup plus que la présentation très résumée qui vient d’en être faite. La circulaire envoyée aux préfets fin 2015 sur les incidences de la suppression de la clause de compétences générales des départements et régions sur l’exercice des compétences des collectivités locales en donne une illustration.

B) L’évolution des dépenses

Le taux de croissance des dépenses des départements et des régions est majoré par le dynamisme des dépenses qui leur ont été transférées par l’Etat depuis le premier mouvement de décentralisation au début des années 1980. Pour en tenir compte, le graphique ci-dessous présente à la fois l’évolution de leurs dépenses totales et celle de leurs dépenses après déduction de celles qui leur ont été transférées, telles que chiffrées dans les rapports de l’observatoire des finances locales. Pour les départements, il s’agit du RMI-RSA, de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), des dépenses de fonctionnement et d’équipement des collèges et de celles des services d’incendie et de secours. Pour les régions, il s’agit des dépenses liées à la formation professionnelle et à l’apprentissage, aux transports ferroviaires et au fonctionnement et à l’équipement des lycées.

Les dépenses des régions ont été les plus dynamiques au cours des 15 dernières années, que l’on exclue ou non les dépenses transférées par l’Etat. Celles du « secteur communal » (communes et groupements à fiscalité propre) et des départements (en incluant les dépenses transférées par l’Etat) ont enregistré des taux de croissance en moyenne voisins, plus irrégulier s’agissant du secteur communal car lié aux effets du cycle électoral sur l’investissement. Hors dépenses transférées par l’Etat (surtout des prestations sociales), les dépenses des départements ont la dynamique la plus faible.

Source : rapports de l’observatoire des finances et de la gestion locales ; budgets principaux ; FIPECO

C) L’autonomie financière et fiscale

Les recettes autres que les dotations de l’Etat (recettes fiscales, redevances pour services rendus, participation des ménages aux frais de certains services, ventes de produits…) représentent 80 % des recettes de fonctionnement du secteur communal, 86 % de celles des départements et 92 % de celles des régions en 2022.

En précisant que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources », l’article 72-2 de la Constitution a posé un « principe d’autonomie financière des collectivités territoriales ». Leurs ressources propres incluent les recettes fiscales dont l’Etat fixe le taux et, selon le Conseil constitutionnel, il ne résulte d’aucune disposition constitutionnelle que les collectivités locales bénéficieraient d’une « autonomie fiscale » (décision 2009-599 DC du 29 décembre 2009).

Une loi organique du 29 juillet 2004 précise comment calculer le taux d’autonomie financière, notamment en définissant les ressources propres non fiscales (redevances pour services rendus…) et en stipulant que ce taux ne doit pas être inférieur à celui atteint en 2003 pour chaque catégorie de collectivité (61 % pour les communes et établissement publics de coopération intercommunale, 59 % pour les départements et 42 % pour les régions). Une réforme de la fiscalité locale faisant passer ce taux d’autonomie financière au-dessous de cette référence historique serait probablement inconstitutionnelle.

Les ratios d’autonomie financières constatés en 2020 étaient de 71 % pour le bloc communal, de 75 % pour les départements et de 74 % pour les régions.

Ces ratios ne mesurent qu’imparfaitement l’autonomie fiscale de chacun des trois niveaux de collectivités locales, car celles-ci n’ont aucun pouvoir de fixation du taux de certains impôts, comme la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ou la fraction de TVA attribuée aux régions à partir de 2018, ou seulement un pouvoir de modulation de ce taux dans d’étroites limites, comme c’est le cas pour la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE)[1].

Si les impôts locaux sur lesquels elles ont un pouvoir de fixation du taux, notamment les impôts fonciers, représentent 46 % des recettes de fonctionnement du secteur communal et 28 % de celles des départements (en y incluant les droits de mutation) en 2022, ce ratio est seulement de 23 % pour les régions, qui ne peuvent moduler pour l’essentiel que le taux des certificats d’immatriculation et d’une fraction de la TICPE.

Les régions forment pourtant le niveau de collectivité dont les dépenses ont le plus fortement augmenté ces dernières années. Cet « effet de ciseau » entre des dépenses de fonctionnement dynamiques et des recettes qui le sont beaucoup moins, faute de pouvoir relever les taux, peut expliquer la dégradation de leur situation financière certaines années.

Les départements ont eux aussi été confrontés certaines années à un effet de ciseau entre, d’un côté, des dépenses de fonctionnement tirées vers le haut par des dépenses sociales (RMI-RSA et APA notamment) dynamiques et pour lesquelles ils ont peu de moyens de pilotage et, d’un autre côté, des recettes fiscales tirées vers le bas par des DMTO pénalisés par la baisse ou l’atonie du marché immobilier.

D) L’épargne brute et la capacité de financement

La situation financière est appréciée au regard de deux ratios :

- le rapport de « l’épargne brute » (recettes moins dépenses de fonctionnement) aux recettes de fonctionnement ;

- le rapport de « la capacité de financement » (épargne brute + recettes d’investissement hors emprunts – investissements non financiers et subventions d’investissement[2]) aux recettes de fonctionnement.

Rapportée aux recettes de fonctionnement en 2022, l’épargne brute des régions (21 %) est plus élevée que celle des départements (17 %) et du secteur communal (16 %), notamment parce qu’elles investissent relativement plus.

En 2022, la capacité de financement des régions est négative (- 5 % de leurs recettes de fonctionnement), celles des départements est positive (4 % des recettes de fonctionnement) et celle du secteur communal est très légèrement positive.

E) L’endettement

L’endettement des collectivités territoriales à la fin de 2022 représentait 94 Md€ pour le secteur communal, 34 Md€ pour les régions et 31 Md€ pour les départements.

Il était ainsi égal à 4,6 fois l’épargne brute annuelle du secteur communal, à 5,5 fois celle des régions et à 2,6 fois celle des départements.

 

[1] Sous réserve de quelques rares possibilités d’accorder des exonérations et dégrèvements, elles n’ont pas le pouvoir de déterminer l’assiette des impôts qu’elles perçoivent.

[2] Cette capacité de financement issue des comptes agrégés des collectivités locales dans leur système comptable propre est assez proche de la capacité de financement au sens de la comptabilité nationale.

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