30/04/2020
Les finances publiques dans la zone euro en 2019
François ECALLE
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Les comptes provisoires des administrations publiques des pays de l’Union européenne publiés le 22 avril par Eurostat permettent une première comparaison des finances publiques de la France et des autres pays de la zone euro en 2019. Elle pourra être complétée par une analyse des composantes conjoncturelles et structurelles des soldes publics lorsque les organisations internationales (Commission européenne, OCDE, FMI) les auront publiées.
En pourcentage du PIB, le déficit public a baissé de 0,2 point en France en 2019, hors impact de la transformation du CICE, sous l’effet d’une baisse de 0,1 point des dépenses et d’une hausse de 0,1 point des recettes publiques. Il a augmenté de 0,1 point dans la zone euro, sous l’effet d’une hausse des dépenses. A 2,1 % du PIB (hors CICE) le déficit de la France était le deuxième de la zone euro derrière celui de l’Espagne. Le solde public de l’Allemagne était excédentaire (1,4 % du PIB), de même que celui de 10 autres pays de la zone.
Les dépenses publiques ont augmenté en euros courants de 2,6 % en France en 2019, soit moins que dans la zone euro (3,3 %) et en Allemagne (4,6 %). La France est néanmoins restée au premier rang de la zone pour le rapport de ses dépenses publiques au PIB. Les investissements publics ont fortement augmenté dans la zone euro (6,1 %), plus particulièrement en France et en Allemagne (7,8 % dans les deux pays).
En France, les mesures législatives ont réduit les prélèvements obligatoires (hors CICE) mais leur élasticité au PIB a été supérieure à un, ce qui a contribué à les accroître plus que le PIB. Cette décomposition n’est pas encore possible pour les autres pays.
La dette publique de la France est restée stable de fin 2018 à fin 2019 (à 98,1 % du PIB), alors qu’elle a baissé de 1,4 point de PIB dans la zone euro. La moyenne de la zone était de 84,1 % du PIB fin 2019. La dette de l’Allemagne (59,8 % du PIB) est repassée sous le seuil de 60 %, au-dessous duquel se trouvaient 9 autres pays. Seuls quatre pays de la zone euro avaient une dette supérieure à celle de la France (Grèce, Italie, Portugal et Belgique). Au seuil de la crise, la dette publique de la France était donc supérieure à celle de la plupart de ses partenaires.
A) Le déficit public
Le déficit public a augmenté de 0,7 point de PIB en 2019 en France. Il a toutefois baissé de 0,2 point si on neutralise l’impact de la transformation du CICE en allègements de cotisations sociales alors qu’il a augmenté de 0,1 point en moyenne dans la zone euro.
Le déficit public français s’est ainsi établi à 3,0 % du PIB en 2019 (2,1 % hors CICE), alors que le déficit moyen de la zone représentait 0,6 % du PIB. Le déficit de la France était le plus important de la zone euro, le deuxième après celui de l’Espagne (2,8 % du PIB) si on en soustrait le surcoût temporaire de la transformation du CICE. Le déficit italien était de 1,6 % du PIB. Le solde public de l’Allemagne était excédentaire (1,4 % du PIB), de même que celui de 10 autres pays de la zone.
Source : Eurostat ; FIPECO.
En pourcentage du PIB, la réduction de 0,2 point du déficit public hors CICE en France a résulté d’une baisse de 0,1 point des dépenses et d’une hausse de 0,1 point des recettes des administrations publiques. Dans la zone euro, la hausse de 0,1 point du déficit public s’explique par une hausse de 0,1 point des dépenses.
B) Les dépenses publiques
Les dépenses publiques (crédits d’impôts inclus) ont baissé de 55,7 % du PIB en 2018 à 55,6 % en 2019 en France alors qu’elles sont passées de 47,0 à 47,1 % du PIB dans la zone euro. Elles ont fortement augmenté en Allemagne, de 44,6 % du PIB en 2018 à 45,4 % en 2019.
Comme le montre le tableau suivant, les dépenses publiques ont augmenté en euros courants de 2,6 % en France en 2019, contre 3,3 % dans la zone euro et 4,6 % en Allemagne. Les investissements publics (formation brute de capital fixe et aides à l’investissement) ont fortement augmenté dans la zone euro en 2019, plus particulièrement en France, comme souvent l’année qui précède des élections municipales, et en Allemagne. La masse salariale, les achats courants de biens et services et les prestations sociales ont moins augmenté en France que dans la zone euro ou en Allemagne, ce qui n’a pas été le cas des aides et subventions[1].
Les taux de croissance des dépenses publiques en euros en 2019 (%)
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France
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Zone euro
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Allemagne
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Rémunérations
|
1,3
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3,1
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4,8
|
Achats courants de biens et services
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2,7
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3,8
|
6,3
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Investissements
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7,8
|
6,1
|
7,8
|
Prestations sociales
|
2,7
|
4,0
|
5,0
|
Aides et subventions
|
7,4
|
1,7
|
0,1
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Intérêts
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- 13,4
|
- 8,7
|
-13,2
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Dépenses publiques totales
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2,6
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3,3
|
4,6
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Source : Eurostat ; FIPECO.
La France est néanmoins restée au premier rang de la zone euro, de l’Union européenne et très probablement de l’OCDE pour ses dépenses publiques, en pourcentage du PIB, devant la Finlande (53,3 % du PIB) et la Belgique (52,2 %).
Comme le montre le graphique ci-joint, les dépenses publiques ont atteint un point haut, en pourcentage du PIB, dans la zone euro pendant la crise de 2009. Elles ont ensuite diminué dans l’ensemble de la zone (moins que la moyenne en France). Elles remontent en Allemagne depuis 2016.
Source : Eurostat ; FIPECO.
C) Les recettes publiques
Les recettes publiques comprennent les prélèvements obligatoires (PO) et des recettes « non obligatoires » comme les redevances d’utilisation du domaine public, les dividendes des entreprises dans lesquelles l’Etat détient une participation ou encore le produit de la vente de services par les administrations. Le rapport des recettes publiques au PIB n’est donc pas égal au taux des PO mais ces deux ratios ont généralement des évolutions très proches car les PO forment l’essentiel des recettes publiques. Les statistiques européennes disponibles pour 2019 ne distinguent pas les PO des autres recettes publiques.
La part des recettes publiques totales dans le PIB est passée en France de 53,4 % en 2018 à 52,6 % en 2019, ou 53,5 % hors effet du remplacement du CICE, alors qu’elle est restée à 46,5 % du PIB dans la zone euro. Elle a augmenté en Allemagne, de 46,4 à 46,8 % du PIB.
Les variations annuelles de ce ratio peuvent avoir deux explications : des mesures législatives peuvent augmenter ou réduire les prélèvements obligatoires ; l’élasticité des recettes publiques au PIB (le rapport entre les taux de croissance des recettes à législation constante et du PIB en valeur) peut différer de l’unité.
En France (cf. billet précédent), les mesures législatives, hors remplacement du CICE, ont contribué à réduire les prélèvements obligatoires mais leur élasticité au PIB a été supérieure à un, ce qui a contribué à les accroître plus que le PIB. Il n’est pas encore possible de faire cette décomposition pour les autres pays.
D) La dette publique
La dette publique de la France est restée stable de fin 2018 à fin 2019, en pourcentage du PIB (98,1 %), alors qu’elle a baissé de 1,4 point dans la zone euro. Elle n’a augmenté qu’en Lituanie et au Luxembourg. Elle est restée au même niveau en Estonie et en Italie.
La dette publique de la France (98,1 % du PIB) est ainsi restée proche de 100 % du PIB alors que la moyenne de la zone euro était de 84,1 % à la fin de 2019. La dette de l’Allemagne (59,8 % du PIB) est repassée sous le seuil de 60 %, au-dessous duquel se trouvaient 9 autres pays de la zone euro. Seuls quatre pays de la zone avaient une dette publique supérieure à celle de la France à la fin de 2019 : la Grèce (176,6 % du PIB), l’Italie (134,8 %), le Portugal (117,7 %) et la Belgique (98,6 %).
Source : Eurostat ; FIPECO.
[1] Leur augmentation en France tient largement à la création de France Compétences en 2019, organisme inclus dans les administrations publiques et ayant pour mission de centraliser les fonds de la formation professionnelle et de subventionner les organismes de formation (le plus souvent hors du champ des administrations publiques).