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FIPECO le 13.09.2023                                

Les fiches de l’encyclopédie                        II) Déficit et dette publics, politique budgétaire

4) Les actifs des administrations publiques

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Les administrations publiques (APU) au sens de la comptabilité nationale sont définies dans une autre fiche. Elles sont réparties en trois catégories : les « administrations publiques centrales » (APUC), qui regroupent elles-mêmes l’Etat et les « organismes divers d’administration centrale » (ODAC)[1], les « administrations de sécurité sociale » (ASSO) et les « administrations publiques locales » (APUL).

Les administrations publiques s’endettent, en partie, pour financer la construction ou l’acquisition d’actifs, physiques ou financiers, qui constituent leur patrimoine : ouvrages de génie civil, immeubles de bureaux, terrains, brevets et logiciels, participations dans des entreprises, prêts à d’autres agents… Il est donc nécessaire de mettre ces actifs en regard de leurs « dettes brutes » dans des « comptes de patrimoine ».

Cette fiche décrit les méthodes d’estimation de ces actifs ainsi que leur valeur et leur évolution au cours des dernières années. Le patrimoine net des administrations publiques (différences entre leurs actifs et leurs passifs) est également présenté.

A) L’estimation des actifs des APU

1) Les actifs non financiers

Les actifs non financiers de l’État sont inscrits à son bilan, qui est certifié par la Cour des comptes. Ceux des organismes relevant des lois de financement de la sécurité sociale sont inscrits dans un « tableau patrimonial » qui figure en annexe de ces lois et qui est également certifié par la Cour des comptes.

En revanche, il n’existe pas de recensement, encore moins de valorisation, des actifs non financiers des collectivités territoriales et de leurs groupements alors qu’ils sont bien plus importants que ceux de l’Etat.

Les comptes de patrimoine non financier des administrations publiques en comptabilité nationale sont établis par l’Insee en exploitant peu ces éléments des bilans de l’Etat et des organismes de sécurité sociale.

Les actifs non financiers des administrations publiques à la fin de l’année N sont en effet estimés par l’Insee en partant de leurs actifs à la fin de l’année N-1 et en y ajoutant le montant des investissements non financiers réalisés pendant l’année N (la « formation brute de capital fixe »). L’Insee en déduit ensuite le montant estimé de la dépréciation de ces actifs au cours de l’année N (la « consommation de capital fixe »). Le stock d’actifs est ensuite revalorisé pour tenir compte de l’évolution de leur prix, les comptes de patrimoine étant établis en valeur de marché.

Cette méthode soufre de multiples fragilités. La consommation de capital fixe repose sur des coefficients d’amortissement par grandes catégories d’actifs dont la pertinence n’est pas souvent réexaminée. La revalorisation du patrimoine repose sur des indices de prix fragiles et qui ne sont pas toujours adaptés aux actifs considérés. Les éléments de ce patrimoine qui existaient déjà au commencement de cet « inventaire permanent » (le patrimoine culturel ancien notamment) sont partiellement recensés et très forfaitairement valorisés.

Les comptes nationaux ne comprennent pas des comptes de patrimoine non financier dans tous les pays européens et, lorsqu’ils existent, ils sont difficilement comparables car les méthodes mises en œuvre en pratique sont hétérogènes.

2) Les actifs financiers

Les actifs financiers de l’Etat et des organismes relevant du périmètre des lois de financement de la sécurité sociale sont inscrits à son bilan et à leur tableau patrimonial. Ceux des collectivités territoriales et de la plupart des établissements publics sont recensés par la direction générale des finances publiques. La Banque de France utilise ces informations comptables pour estimer les actifs financiers qui figurent dans les comptes de patrimoine financier des administrations publiques.

B) La valeur des actifs des APU

1) Les actifs non financiers en 2022

Les actifs non financiers de l’État sont inscrits à son bilan à hauteur de près de 650 Md€ à la fin de 2022[2]. Ceux des organismes relevant des lois de financement de la sécurité sociale figurent pour moins de 10 Md€ à leur tableau patrimonial.

En comptabilité nationale, les actifs non financiers des administrations publiques s’élèvent à la fin de 2022 à 2 716 Md€, soit 102,8 % du PIB. Leur montant était de 2 557 Md€ à la fin de 2021 et l’augmentation de leur valeur résulte pour 129 Md€ de leur réévaluation du fait de la hausse des prix des biens immobiliers et des équipements. Environ 72 % d’entre eux sont inscrits à l’actif des administrations publiques locales.

Les actifs non financiers des administrations publiques dans leur ensemble sont constitués pour 42 % par des terrains, généralement bâtis, les espaces naturels étant valorisés à un prix égal à zéro. Les bâtiments non résidentiels en représentent 15 % et les autres ouvrages de génie civil 32 %. Les immobilisations incorporelles, les systèmes d’armes et les logements ont des parts beaucoup plus limitées.

Source : Insee, FIPECO.

2) Les actifs financiers en 2022

Les actifs financiers des administrations publiques sont estimés à 1 689 Md€, soit 63,9 % du PIB à la fin de 2022 (après 1 716 Md€ et 68,6 % du PIB fin 2021). Ils sont composés d’actions (participations de l’Etat dans des sociétés notamment) pour 39 %, de crédits pour 11 %, de liquidités pour 16 %, de titres de créance (obligations, par exemple) pour 3 %. Une catégorie « autres » en représente 31 % et correspond surtout à des produits tels que les impôts et cotisations à recevoir au titre de l’exercice clos.

Ils sont détenus à hauteur de 56 % par les administrations centrales, 15 % par les administrations locales et 30 % par les administrations de sécurité sociale. S’agissant de ces dernières, ce sont, pour environ la moitié, des produits à recevoir (cotisations et impôts notamment) et, pour une grande partie de l’autre moitié, les actifs des régimes de retraite complémentaires, du fonds de réserve des retraites….

Source : Insee ; FIPECO.

3) L’évolution des actifs des administrations publiques depuis 1995

La valeur des actifs des administrations publiques est passée de 106 % du PIB en 1995 à 152 % en 2010. Au cours de cette période, la valeur des actifs financiers a augmenté de 10 points de PIB et celle des actifs non financiers de 35 points. Les actifs « produits » (c’est-à-dire hors terrains pour l’essentiel) se sont accrus de 7 points de PIB entre 2000 et 2010 et les terrains de 27 points. La forte hausse des actifs sur cette période résulte principalement de la croissance des prix du foncier.

Ensuite, la valeur du total des actifs a un peu diminué de 2010 à 2015 du fait des terrains et, secondairement, des actifs produits pour revenir ensuite en 2019 à peu près au niveau de 2010, surtout sous l’effet d’une nouvelle hausse de la valeur des terrains. La valeur du total des actifs a de nouveau augmenté en 2020, de 148 à 171 % du PIB, surtout en raison de la baisse du PIB et de la hausse du prix du foncier. Elle a peu varié en 2021 puis a diminué en 2022 (166 % du PIB) du fait de la baisse des actifs financiers, les terrains et les actifs produits ayant des évolutions divergentes résultant sur tout de celles de leurs prix respectifs.

Source : Insee ; FIPECO

C) Le patrimoine net des administrations publiques

Si la dette publique au sens du traité de Maastricht s’élève à 2 950 Md€, soit 111,8 % du PIB, à la fin de 2022, le total des passifs des administrations publiques se situe à 3 540 Md€, soit 133,9 % du PIB. En effet, les actifs et passifs des administrations publiques en comptabilité nationale ne sont pas consolidés[3] et sont exprimés en valeur de marché[4] alors que la dette publique au sens du traité de Maastricht est consolidée, est exprimée en valeur faciale et correspond à seulement une partie des passifs (les charges à payer en sont par exemple exclues).

Le passif des administrations publiques en comptabilité nationale a ainsi diminué de 342 Md€ en 2022 parce que, si le volume de leurs dettes s’est accru de 130 Md€, la valeur de marché des obligations émises a baissé de 472 Md€ du fait de la hausse des taux d’intérêt.

Le patrimoine net des administrations publiques, différence entre le total des actifs et le total des passifs, vaut 864 Md€, soit 32,7 % du PIB, à la fin de 2022.

Le patrimoine net des administrations centrales est fortement négatif (- 1 233 Md€), car elles portent l’essentiel de la dette publique, tandis que celui des administrations locales est largement positif (1 896 Md€), car elles détiennent l’essentiel des actifs non financiers. Celui des administrations de sécurité sociale est positif (201 Md€).

Source : Insee ; FIPECO

Ce patrimoine net représentait 27 % du PIB en 1995 et à peu près autant en 2002. Il a ensuite fortement augmenté pour atteindre 58 % du PIB en 2007, surtout en raison d’une forte hausse de la valeur des actifs non financiers, qui tient presque entièrement à la valeur des terrains.

La valeur du patrimoine net a ensuite diminué de 50 points entre 2007 et 2020 jusqu’à 8 % du PIB. Elle est ensuite remontée jusqu’à 33 % du PIB en 2022, du fait de la baisse de la valeur de marché des passifs des administrations publiques. La valeur nette du patrimoine des administrations publiques est ainsi revenue presque à son niveau de 2000 (29 % du PIB). Depuis cette date, leur passif s’est accru de 54 points de PIB, ce qui a été à peu près compensé par une augmentation de 31 points de PIB de la valeur de leurs terrains, de 10 points de la valeur des actifs produits et de 7 points de la valeur de leurs actifs financiers.

Si le patrimoine des administrations publiques tel qu’il est estimé dans les comptes nationaux donne une information intéressante, la dette publique brute au sens du traité de Maastricht est un meilleur indicateur pour apprécier la soutenabilité des finances publiques pour les raisons suivantes.

D’une part, les obligations émises par les administrations publiques sont très majoritairement remboursées à leur échéance et à leur valeur faciale. En 2019, donc avant la crise, les remboursements d’OAT à l’échéance ont ainsi été de 130 Md€ et les remboursements anticipés de 46 Md€ ; en 2022, ces montants ont été respectivement de 146 Md€ et 26 Md€. Quand elles sont remboursées par anticipation, c’est moins de deux ans avant leur échéance et à une valeur qui est proche de leur valeur faciale. 

D’autre part, la plupart des actifs non financiers des administrations publiques font partie du domaine public et sont donc « inaliénables et imprescriptibles » en application d’une législation qui remonte à l’édit de Moulins en 1566. En pratique, ils peuvent être cédés après avoir été déclassés pour être transférés au « domaine privé » des administrations, ce qui suppose de mettre en œuvre des procédures parfois complexes allant jusqu’au vote d’une loi. En tout état de cause, la vente de certains biens est impossible techniquement (la voirie municipale…) ou serait très difficile politiquement (les palais nationaux…).

 

[1] Organismes publics ayant une activité non marchande et contrôlés par l’État.

[2] Immobilisations corporelles et incorporelles et stocks (valeurs nettes).

[3] La consolidation consiste à éliminer les créances et dettes réciproques entre administrations publiques.

[4] La valeur à laquelle les titres sont échangés sur le marché et non le montant qui sera remboursé (valeur faciale).

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