Fipeco

Partager Partage sur Twitter Partage sur Facebook Partage sur Linkedin


22/09/2021

Le patrimoine des collectivités locales à la fin de 2020

François ECALLE

PDF à lire et imprimer

Les administrations publiques locales (APUL), dont le champ est un peu plus étendu que celui des collectivités locales, sont endettées mais elles détiennent, en contrepartie de leurs dettes, des actifs financiers et surtout non financiers très importants qui doivent être pris en compte pour analyser leur situation financière. L’endettement public peut en effet être justifié quand il permet d’accroître les actifs publics. Les comptes de patrimoine publiés par l’Insee permettent d’établir le bilan des APUL à la fin de 2020.

Les actifs et passifs des administrations publiques en comptabilité nationale ne sont pas consolidés[1] et sont exprimés en valeur de marché[2] alors que la dette publique au sens du traité de Maastricht est consolidée, est exprimée en valeur faciale et correspond à seulement une partie des passifs (les charges à payer en sont par exemple exclues). Les fiches de l’encyclopédie de FIPECO sur la dette publique et les actifs des administrations publiques présentent plus précisément leur définition et les méthodes utilisées pour les estimer.

Si la dette des APUL au sens du traité de Maastricht était de 230 Md€ fin 2020, leur passif en comptabilité nationale s’élevait à 292 Md€, en hausse de 23 Md€ par rapport à fin 2019. Il est constitué pour 66 % par des emprunts bancaires.

La valeur de leurs actifs financiers était de 219 Md€ fin 2020. Elle a augmenté de 18 Md€ par rapport à fin 2019 surtout en raison d’une hausse de 15 Md€ de leurs liquidités (75 Md€ fin 2020).

Leurs actifs non financiers valaient 1 686 Md€ fin 2020, soit 73 % du PIB. Ils sont notamment constitués de terrains, pour 49 %, et d’ouvrages de génie civil, pour 31 %. Leur valeur a augmenté de 105 Md€ de fin 2019 à fin 2020, dont 99 Md€ pour les terrains.

La valeur du patrimoine net des APUL (actifs – passifs) était de 1 614 Md€ (70 % du PIB) à la fin de 2020, en hausse de 101 Md€ par rapport à fin 2019, presque entièrement du fait de la revalorisation des terrains.

De 1995 à 2020, la valeur nette du patrimoine des APUL a augmenté de 40 points de PIB dont 37 point pour leurs actifs non financiers (31 points pour les terrains et 6 points pour les autres actifs non financiers). Les actifs financiers se sont accrus de 4 points de PIB et les passifs de 1 point.

Cette bonne situation financière des APUL doit être relativisée en notant qu’elles bénéficient de 50 Md€ par an de subventions de l’Etat ainsi que 65 Md€ de dégrèvements d’impôts locaux pris en charge par l’Etat et d’impôts d’Etat transférés.

A) Le compte des administrations publiques locales

Les administrations publiques locales (APUL) forment l’une des catégories des administrations publiques au sens de la comptabilité nationale. Elles comprennent les collectivités territoriales, les groupements de communes à fiscalité propre et les « organismes divers d’administration locale » (ODAL). Ces derniers sont constitués des établissements publics locaux tels que les centres communaux d’action sociale, les services départementaux d’incendie et de secours, les collèges et les lycées, ainsi que de certains établissements publics nationaux dont l’activité s’exerce sur une partie du territoire (parcs nationaux, chambres consulaires, agences de l’eau, Société du Grand Paris etc.).

Le compte des administrations publiques locales en comptabilité nationale est établi par la direction générale des finances publiques, sous l’autorité de l’Insee, pour l’essentiel en agrégeant et retraitant les comptes des collectivités locales et de leurs groupements, établis selon leurs règles comptables particulières (M14 pour les communes, M52 pour les départements…).. Ces retraitements ont pour objet d’appliquer les règles de la comptabilité nationale à ces comptes agrégés.

L’Insee ne distingue pas les collectivités territoriales et les ODAL dans les comptes de patrimoine mis en ligne mais donne des indications sur la répartition de la dette au sens du traité de Maastricht.

B) Les passifs

Si la dette des administrations publiques locales (APUL) au sens du traité de Maastricht s’élève à 230 Md€, soit 10,0 % du PIB, à la fin de 2020, le total des passifs des administrations publiques se monte à 292 Md€, soit 12,7 % du PIB[3].

Ces passifs sont constitués d’emprunts bancaires (66 % du total), d’obligations (16 %) et de charges à payer aux fournisseurs ou aux bénéficiaires de prestations sociales (18 %).

Ils ont augmenté de 23 Md€ par rapport à fin 2019 (269 Md€) et sont passés de 11,0 à 12,7 % du PIB. Les emprunts bancaires ont augmenté de 4 Md€ et les obligations de 19 Md€. Le montant des charges à payer n’a pas changé.

La hausse de la dette au sens du traité de Maastricht (20 Md€) est imputable pour 11,1 Md€ à la Société du Grand Paris, pour 1,5 Md€ à Ile-de-France Mobilités, pour 2,9 Md€ aux régions et pour 2,5  Md€ aux communes.

C) Les actifs financiers

Les actifs financiers des APUL sont estimés à 219 Md€, soit 9,5 % du PIB, à la fin de 2020. Ils sont composés notamment d’actions et titres de participations à hauteur de 25 %, de liquidités (35 %) et de produits à recevoir (31 %).

Ces actifs financiers ont augmenté de 18 Md€ par rapport à fin 2019 et sont passés de 8,2 à 9,5 % du PIB. Le montant des liquidités détenues par les APUL a augmenté de 15 Md€ car elles ont emprunté plus que nécessaire pour profiter de taux d’intérêt faibles et placé le produit de ces emprunts sur des comptes de dépôts, notamment sur leur compte courant au Trésor. La trésorerie de la Société du Grand Paris a augmenté de 8,4 Md€ et celle des communes de 3,6 Md€. Le montant des produits à recevoir n’a pas varié.

La trésorerie accumulée fin 2020 (75 Md€) devrait permettre aux APUL de moins emprunter en 2021.

D) Les actifs non financiers

Les actifs non financiers des administrations publiques sont estimés à 1 686 Md€ à la fin de 2020, soit 73,2 % du PIB. Ils représentent 71 % de ceux de l’ensemble des administrations publiques.

Ils sont principalement composés de terrains (49 % de la valeur totale), généralement bâtis (les espaces naturels sont valorisés à un prix égal à zéro), d’ouvrages de génie civil comme les routes (31 %) et de bâtiments non résidentiels (bureaux notamment ; 15 %). Certains de ces actifs sont immatériels, mais les droits de propriété intellectuelle (logiciels, œuvres artistiques…) n’en constituent que 1 %. L’estimation de ces actifs présente souvent d’importantes difficultés en pratique comme le montre une autre fiche sur ce site. Le patrimoine historique est ainsi souvent enregistré pour une valeur conventionnellement nulle.

Ces actifs non financiers ont augmenté de 105 Md€ par rapport à fin 2019 et sont passés de 64,8 % à 73,2 % du PIB.

L’augmentation de leur valeur en 2020 tient pour 99 Md€ à la valeur des terrains. Pour le reste, on constate une hausse de 3 Md€ de la valeur des ouvrages de génie civil.

La variation de la valeur des actifs non financiers du début à la fin d’un exercice résulte notamment des investissements réalisés au cours de cet exercice, de la dépréciation de ces actifs (la « consommation de capital fixe » en comptabilité nationale, qui correspond aux dotations aux amortissements de la comptabilité d’entreprise), des acquisitions et cessions d’actifs, enfin de l’évolution des prix de ces actifs. Leur augmentation de fin 2020 à fin 2021 résulte presque entièrement de la hausse du prix des terrains estimée par l’Insee.

La hausse de leur valeur en pourcentage du PIB résulte également, pour environ la moitié, de la diminution de la valeur du PIB.

Source : Insee ; FIPECO.

E) La valeur du patrimoine net

1) Le patrimoine net en 2020

Le patrimoine net des administrations publiques locale, différence entre le total des actifs et le total des passifs, vaut 1 614 Md€, soit 70 % du PIB, à la fin de 2020, alors que celui des administrations publiques centrales (L’Etat et les organismes publics non marchands qu’il contrôle) est négatif pour un montant équivalent en valeur absolue (- 1 610 Md€).

Il faut toutefois noter que les collectivités locales reçoivent des transferts financiers de l’Etat qui représentent de 50 Md€ (concours financiers au sens strict) à 115 Md€ par an (en y ajoutant les dégrèvements d’impôts locaux pris en charges par l’Etat, comme les dégrèvements de taxe d’habitation, et les impôts d’Etat transférés, comme une partie de la TVA ou de la taxe intérieure de consommation des produits énergétiques).

Le patrimoine net des APUL a augmenté de 101 Md€ entre fin 2019 et fin 2020, ce qui résulte quasi-totalement de la revalorisation, c’est-à-dire de la hausse des prix, des terrains.

2) Le patrimoine net de 1995 à 2020

De 1995 à 2020, les passifs des administrations publiques locales (APUL) sont restés compris entre 9 et 13 % du PIB et leurs actifs financiers sont restés compris entre 6 et 10 % du PIB.

La valeur des actifs non financiers est passée d’environ 36 % du PIB dans la deuxième moitié des années 1990 à environ 60 % du PIB dans les années 2005 à 2019 puis à 70 % en 2020.

La valeur nette de leur patrimoine a suivi quasiment la même évolution que celle de la valeur des actifs non financiers.

Source : Insee ; FIPECO

Les « actifs produits » des APUL (hors terrains pour l’essentiel) sont passés d’environ 30 % du PIB dans les années 1995 à 2003 à une valeur comprise entre 35 et 38 % du PIB dans les années 2008 à 2020.

La valeur des terrains a connu une très forte hausse dans les années 1998 (6 % du PIB) à 2006 (28 % du PIB) puis est restée comprise entre 25 et 30 % du PIB de 2007 à 2019 avant de croître de nouveau en 2020 pour atteindre 36 % du PIB. Cet accroissement est lié à l’augmentation des prix du foncier en France sur ces mêmes années.

Source : Insee, FIPECO

Au total, de 1995 à 2020, la valeur nette du patrimoine des APUL a augmenté de 40 points de PIB dont 37 points pour leurs actifs non financiers (31 points pour les terrains et 6 points pour les autres actifs non financiers). Les actifs financiers se sont accrus de 4 points de PIB et les passifs de 1 point.

 

[1] La consolidation consiste à éliminer les créances et dettes réciproques entre administrations publiques.

[2] La valeur à laquelle les titres sont échangés sur le marché et non le montant qui sera remboursé (valeur faciale).

[3] Les différences entre la dette publique au sens du traité de Maastricht et le passif des administrations publiques en comptabilité nationale ont été rappelés au tout début de cette note.

Revenir en haut de page