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02/03/2022

Les dépenses par politique publique en 2020

François ECALLE

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Eurostat vient de publier la ventilation des dépenses publiques par « fonction » en 2020 dans les pays de l’Union européenne. Les « fonctions » de cette nomenclature correspondent pour la plupart à des politiques publiques. Ces données permettent donc de comparer le coût des politiques publiques, en pourcentage du PIB, en France et dans les autres pays européens (l’Allemagne, la zone euro et l’Union européenne à 27 dans ce billet). Elles permettent également de comparer la répartition des dépenses par politique publique en pourcentage du total des dépenses, donc de voir à quelles politiques les dépenses publiques ont été affectées en priorité selon les pays.

Les dépenses publiques de la France représentaient 61,6 % du PIB en 2020 contre des moyennes comprises entre 53 et 54 % du PIB dans la zone euro et l’Union européenne (50,8 % du PIB en Allemagne).

Le poids des dépenses publiques en pourcentage du PIB est plus important en France pour toutes les fonctions à l’exception de la sécurité intérieure, des transports et des fonctions supports. A un niveau de détail plus fin, on peut noter qu’il est aussi plus faible pour la justice, la recherche fondamentale et les enseignements primaire et supérieur.

L’écart total entre la France et les moyennes de l’Union européenne et de la zone euro résulte surtout des retraites (2 à 3 points), de la santé (un peu plus de 1 point), du chômage (environ 1 point), du logement (1 point) et des « affaires économiques », ensemble hétérogène recouvrant surtout les transports et des aides aux ménages et subventions aux entreprises (0,8 point).

L’écart total par rapport à l’Allemagne tient surtout aux retraites (plus de 3 points), aux affaires économiques (plus de 2 points), au logement et au chômage (plus de 1 point).

La répartition des dépenses par politique publique en pourcentage du total des dépenses publiques montre que la France a donné une priorité plus grande que les autres pays aux retraites, au logement, au chômage, à la lutte contre l’exclusion et à la Défense. Cette priorisation, par rapport à celle des autres pays, s’est faite au détriment de la santé, de l’enseignement, de la sécurité intérieure et des fonctions supports.

A) Le coût des politiques publiques en pourcentage du PIB

Les raisons pour lesquelles les dépenses publiques sont rapportées au PIB et ainsi comparées entre les pays ont été présentées dans un billet précédent.

L’année 2020 a été marquée par une crise exceptionnelle mais les écarts entre la France et les autres pays européens ne sont pas très différents de ceux qui étaient constatés les années précédentes. En effet, dans tous les pays de l’Union européenne, le rapport des dépenses publiques au PIB a été majoré par la diminution du PIB, d’une part, et la hausse de dépenses qui ont été souvent les mêmes (santé, chômage, aides aux entreprises), d’autre part.

Les dépenses publiques de la France représentaient 61,6 % du PIB en 2020 contre des moyennes comprises entre 53 et 54 % du PIB dans la zone euro et l’Union européenne à 27 (50,8 % du PIB en Allemagne).

Les dépenses publiques par fonction en % du PIB en 2020

France

Allemagne

Union européenne

Zone euro

Protection sociale

Dont : retraites

Santé et maternité

Famille

Chômage

Exclusion sociale

Aides personnelles au logement

36,3

15,7

12,3

2,4

3,3

1,5

0,9

30,3

12,3

11,9

2,2

2,2

0,7

0,3

30,0

12,9

11,0

2,0

2,2

1,1

0,3

30,9

13,4

11,3

1,9

2,5

1,1

0,4

Aides à pierre, équipements collectifs

1,1

0,5

0,6

0,6

Enseignement

5,5

4,7

5,0

4,9

Loisirs, culture et culte

1,5

1,1

1,2

1,2

Protection de l’environnement

1,0

0,7

0,9

0,9

Affaires économiques

Dont : transports

6,8

2,2

4,6

1,8

6,1

2,3

5,9

2,1

Sécurité intérieure et justice

1,8

1,7

1,8

1,8

Défense

1,9

1,1

1,3

1,3

Services généraux

4,4

5,4

4,7

4,7

Intérêts de la dette publique

1,4

0,7

1,5

1,6

Total des dépenses publiques

61,6

50,8

53,1

53,8

SourSource : Eurostat ; FIPECO

Les dépenses publiques consacrées à la protection sociale s’élevaient à 36,3 points de PIB en France en 2020, contre des moyennes européennes comprises entre 30 et 31 points (30,3 points en Allemagne)[1].

Les dépenses de retraite ont atteint 15,7 % du PIB en France contre des moyennes européennes de l’ordre de 13 à 13,5 % du PIB (12,3 % en Allemagne). C’est la plus importante source d’écart entre les dépenses publiques de la France et des autres pays européens.

Les dépenses publiques de santé représentaient 12,3 % du PIB en France alors que les moyennes européennes étaient comprises entre 11,0 et 11,3 % du PIB (11,9 % du PIB en Allemagne). Les seules dépenses hospitalières s’élevaient à 3,8 % du PIB en France, les moyennes européennes étant de 3,4 % du PIB (3,0 % pour l’Allemagne).

Les dépenses associées au chômage (y compris partiel) ont atteint 3,3 % du PIB en France et 2,2 à 2,5 % du PIB en moyenne dans la zone euro et l’Union européenne (2,2 % en Allemagne).

Les dépenses affectées aux familles et à la lutte contre l’exclusion sociale étaient un peu plus élevées en France.

En additionnant les aides personnelles au logement, les aides à la pierre et les dépenses relatives aux équipements collectifs associés, le coût de la politique du logement s’est élevé à 2,0 % du PIB en France alors que les moyennes européennes étaient seulement d’environ 1,0 % du PIB (0,8 % en Allemagne).

Le poste « affaires économiques » est très hétérogène et recouvre notamment les dépenses liées aux transports (construction et entretien des routes…) ainsi que des aides aux ménages et des subventions aux entreprises relevant de politiques publiques très diverses à finalité économique (aides à l’agriculture, aides à l’innovation, crédit d’impôt pour l’emploi de salariés à domicile…et mesures d’urgence en faveur des entreprises en 2020). Leur coût total a atteint 6,8 % du PIB en France en 2020 et environ 6,0 % du PIB en moyenne dans la zone euro et l’Union européenne (4,6 % du PIB en Allemagne). Le coût de la seule politique des transports en France est proche des moyennes européennes et un peu plus élevé qu’en Allemagne.

Les dépenses militaires de la France ont représenté 1,9 % du PIB en France contre 1,3 % en moyenne dans la zone euro et l’Union européenne (1,1 % en Allemagne).

Enfin, la France a dépensé plus pour l’enseignement (5,5 % du PIB) que la moyenne européenne (5,0 % du PIB) et que l’Allemagne (4,7 %). Cependant, si elle a dépensé beaucoup plus pour le secondaire et les « services annexes » (restauration…), elle a moins dépensé pour le primaire et le supérieur en pourcentage du PIB.

Les « services généraux » recouvrent notamment les « fonctions supports » telles que la fonction « d’état-major » (Présidence, assemblées et services du Premier ministre), la fonction financière (ministère des finances), la fonction ressources humaines (ministère de la fonction publique), la fonction de représentation (ministère des affaires étrangères) de l’Etat et des collectivités locales. Leur coût représentait seulement 4,4 % du PIB en France contre une moyenne de 4,7 % dans la zone euro et l’Union européenne (5,4 % en Allemagne).

Ce poste comprend toutefois la recherche fondamentale (non liée à des politiques sectorielles comme la santé, la défense…) qui explique largement cet écart : elle correspondait à 0,3 % du PIB en France contre des moyennes européennes de 0,6 % et 1,1 % en Allemagne. Le coût des fonctions supports au sens strict est quasiment identique en France et en moyenne dans les autres pays européens ou en Allemagne.

Le poste « sécurité intérieure et justice » recouvre les dépenses des forces de l’ordre (police et gendarmerie), du système judiciaire et de l’administration pénitentiaire. Leur coût était au total de 1,8 % du PIB comme en moyenne dans la zone euro et l’Union européenne (1,7 % en Allemagne). Le coût des tribunaux est plus faible en France (0,2 % du PIB) que dans la zone euro ou l’Union européenne (0,3 %) et en Allemagne (0,4 %).

Enfin, les intérêts de la dette publique représentaient 1,4 % du PIB en France alors que les moyennes européennes étaient de l’ordre de 1,6 % du PIB. Si la dette française est plus importante, son taux d’intérêt moyen est plus faible. En revanche, le coût de la dette allemande était seulement de 0,7 % du PIB.

B) La répartition des dépenses publiques en pourcentage du total

La comparaison de la répartition des dépenses par politique publique en pourcentage du total des dépenses publiques permet de voir quelles sont les priorités dans l’affectation d’un même montant de ressources.

La répartition des dépenses publiques en % du total en 2020

France

Allemagne

Union européenne

Zone euro

Protection sociale

Dont : retraites

Santé et maternité

Famille

Chômage

Exclusion sociale

Aides personnelles au logement

58,8

25,4

19,9

3,9

5,3

2,4

1,5

59,6

24,3

23,4

4,3

4,3

1,3

0,5

56,4

24,4

20,8

3,8

4,2

2,0

0,7

57,4

25,0

20,9

3,6

4,6

2,1

0,7

Aides à pierre, équipements collectifs

1,8

0,9

1,2

1,1

Enseignement

8,9

9,2

9,4

9,1

Loisirs, culture et culte

2,4

2,2

2,3

2,2

Protection de l’environnement

1,7

1,3

1,6

1,7

Affaires économiques

Dont : transports

11,0

3,5

9,1

3,5

11,5

4,3

11,0

3,9

Sécurité intérieure et justice

2,9

3,4

3,4

3,4

Défense

3,1

2,2

2,5

2,4

Services généraux

7,1

10,6

8,7

8,6

Intérêts de la dette publique

2,3

1,4

2,9

3,0

Total des dépenses publiques

100

100

100

100

Source : Source : Eurostat ; FIPECO

La part de la protection sociale dans le total des dépenses publiques en 2020 n’était pas très différente en France (58,8 %), en moyenne dans la zone euro (57,4 %) ou l’Union européenne (56,4 %) ainsi qu’en Allemagne (59,6 %).

La part des dépenses de santé était un peu plus faible en France, mais les parts des dépenses affectées aux retraites, au chômage et à la lutte contre l’exclusion étaient un peu plus fortes.

La part de la politique du logement en France (3,3 % en additionnant les aides personnelles et à la pierre) était beaucoup plus élevée que les moyennes de l’Union européenne ou de la zone euro, qui sont à 1,9 % (1,4 % en Allemagne).

La part des dépenses affectées à la Défense était plus élevée en France.

Les parts des dépenses affectées à l’enseignement, à la sécurité intérieure et aux services généraux étaient plus faibles en France (y compris en retirant la recherche fondamentale pour ce qui concerne les services généraux).

La part des intérêts de la dette en France était plus faible que les moyennes européennes mais plus forte qu’en Allemagne.

Les différences ne sont pas très significatives pour ce qui concerne les autres postes.

Les médias suivants ont mentionné ce billet :

Le nouvel économiste

Challenges 

 

[1] Dans les publications d’Eurostat, seule une partie des dépenses de santé est incluse dans la fonction « protection sociale » (les prestations en espèces), les autres étant regroupées dans une fonction spécifique « santé ». Dans cette note, toutes les dépenses liées à la santé et l’invalidité sont comprises dans la fonction protection sociale.

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