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FIPECO le 24.03.2024

Les notes d’analyse                                                                    V) Les dépenses publiques

5) D’où provient l’écart entre les dépenses publiques de la France et de l’Union européenne ?

         François ECALLE

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Eurostat vient de publier la ventilation des dépenses publiques par « fonction » en 2022 dans les pays de l’Union européenne. Les « fonctions » de cette nomenclature correspondent pour la plupart à des politiques publiques. Ces données permettent donc de comparer le coût des politiques publiques, en pourcentage du PIB, en France et dans les autres pays européens.

A) Le coût des politiques publiques en pourcentage du PIB

Les dépenses publiques sont rapportées au PIB parce que celui-ci est égal à la somme des revenus et constitue ainsi une mesure approximative de l’assiette sur laquelle sont prélevés les impôts et cotisations sociales qui financent ces dépenses. Cette justification et l’analyse des arguments invoqués pour contester la pertinence de ce ratio sont présentées dans une autre note.

Les dépenses publiques de la France représentaient 58,3 % du PIB en 2022 contre une moyenne de 49,6 % du PIB dans l’Union européenne à 27 (49,5 % du PIB en Allemagne et seulement 43,5 % aux Pays-Bas). Les PIB de la France, de l’Allemagne, de l’Italie, de l’Espagne et des Pays-Bas étaient respectivement de 2 639 Md€, 3 877 Md€, 1 963 Md€, 1 346 Md€ et 958 Md€.

Les dépenses publiques consacrées à la protection sociale s’élevaient à 32,9 points de PIB en France en 2022, contre une moyenne européenne de 27,2 points (28,9 points en Allemagne et seulement 23,0 % aux Pays-Bas)[1].

Les dépenses de retraite ont atteint 14,4 % du PIB en France contre une moyenne de 11,9 % du PIB dans l’Union européenne et 11,9 % en Allemagne, mais 16,2 % en Italie et 6,1 % aux Pays-Bas où les fonds de pension sont très importants. C’est la plus importante source d’écart entre les dépenses publiques en France et dans la moyenne de l’Union européenne.

Les dépenses publiques de santé représentaient 12,2 % du PIB en France alors que la moyenne européenne était 10,5 % du PIB (11,9 % du PIB en Allemagne et 8,9 % en Italie).

Les dépenses associées au chômage (y compris partiel) ont atteint 1,7 % du PIB en France et 1,2 % du PIB en moyenne dans l’Union européenne (1,5 % en Allemagne et 0,6 % aux Pays-Bas).

Les dépenses affectées aux familles et à la lutte contre l’exclusion sociale étaient plus élevées en France (sauf par rapport à l’Italie pour l’exclusion).

Les dépenses publiques par fonction en % du PIB en 2022

 

France

Union européenne

Allemagne

Italie

Espagne

Pays-Bas

Protection sociale

Dont : retraites

Santé

Famille

Chômage

Exclusion sociale

Aides personnelles au logement

32,9

14,4

12,2

2,2

1,7

1,3

0,8

27,2

11,9

10,5

1,9

1,2

1,1

0,3

28,9

11,9

11,9

1,8

1,5

0,9

0,3

29,0

16,2

8,9

1,4

1,0

1,5

0

25,7

12,5

9,7

1,0

1,6

0,7

0

23,0

6,1

11,6

1,9

0,6

2,5

0,4

Aides à pierre, équipements collectifs

1,2

1,0

0,5

3,3

0,5

0,5

Enseignement

5,2

4,7

4,5

4,1

4,4

5,1

Loisirs, culture et culte

1,4

1,1

1,0

0,8

1,2

1,2

Protection de l’environnement

1,1

0,8

0,6

1,0

1,0

1,4

Affaires économiques

Dont : transports

Énergie

6,7

2,0

1,4

5,9

2,2

1,1

5,2

1,9

0,9

6,2

2,1

1,2

5,7

1,9

1,2

5,4

2,0

1,4

Sécurité intérieure et justice

1,7

1,7

1,7

1,8

1,9

1,9

Défense

1,8

1,3

1,0

1,3

1,1

1,3

Recherche fondamentale

0,3

0,6

1,0

0,5

0,5

0,5

Services généraux

3,9

3,7

4,5

3,7

2,9

2,6

Intérêts de la dette publique

2,0

1,7

0,7

4,4

2,4

0,6

Total des dépenses publiques

58,3

49,6

49,5

56,1

47,4

43,5

Source : Eurostat ; FIPECO.

En additionnant les aides personnelles au logement, les aides à la pierre et les dépenses relatives aux équipements collectifs associés à l’habitat, le coût de la politique du logement s’est élevé à 2,0 % du PIB en France alors que la moyenne européenne était seulement de 1,3 % du PIB, mais celle-ci est fortement tirée vers le haut par l’Italie (3,3 % du PIB) du fait d’un crédit d’impôt exceptionnel et en principe temporaire en faveur de la rénovation des logements.

Le poste « affaires économiques » est très hétérogène et recouvre notamment les dépenses liées aux transports (construction et entretien des routes…) ainsi que des aides aux ménages et des subventions aux entreprises relevant de politiques publiques très diverses à finalité économique (aides à l’agriculture, aides à l’innovation, crédit d’impôt pour l’emploi de salariés à domicile…et mesures prises pour faire face à la hausse des prix de l’énergie en 2022). Leur coût total a atteint 6,7 % du PIB en France en 2022 et 5,9 % du PIB en moyenne dans l’Union européenne (5,2 % du PIB en Allemagne et 6,2 % en Italie). Le coût de la seule politique des transports est proche dans l’ensemble de ces pays mais un peu au-dessous de la moyenne en France. Les dépenses relatives à la production et à la consommation d’énergie ont été plus élevées que la moyenne en France et aux Pays-Bas.

Les dépenses militaires de la France ont représenté 1,8 % du PIB contre 1,3 % en moyenne dans l’Union européenne (1,0 % en Allemagne et 1,3 % en Italie).

La France a dépensé plus pour l’enseignement (5,2 % du PIB) que la moyenne européenne (4,7 % du PIB) et que l’Allemagne (4,5 %) et l’Italie (4,1 %) mais les Pays-Bas (5,1 %) sont juste derrière la France.

Le poste « sécurité intérieure et justice » recouvre les dépenses des forces de l’ordre (police et gendarmerie), du système judiciaire et de l’administration pénitentiaire. Leur coût était au total de 1,7 % du PIB en France comme en moyenne dans l’Union européenne ou en Allemagne. Il était un peu plus élevé en Espagne et aux Pays-Bas.

Les « services généraux » recouvrent notamment les « fonctions supports » telles que les fonctions « état-major » (Présidence, assemblées et services du Premier ministre), financière (ministère des finances), ressources humaines (ministère de la fonction publique), représentation (ministère des affaires étrangères) de l’Etat et des collectivités locales. Leur coût représentait 3,9 % du PIB en France contre une moyenne de 3,7 % dans l’Union européenne (4,5 % en Allemagne et 2,6 % aux Pays-Bas).

Dans la nomenclature d’Eurostat, le poste « services généraux » comprend les intérêts de la dette publique et la recherche fondamentale (non liée à des politiques sectorielles comme la santé, la défense…) qui en ont été retirés dans le présent billet pour être isolés.

La recherche fondamentale représentait 0,3 % du PIB en France contre une moyenne de 0,6 % dans l’Union européenne (1,0 % en Allemagne). Si on y ajoute la recherche appliquée incluse dans les autres fonctions, le total était cependant de 1,3 % du PIB pour la France (y compris le coût du crédit d’impôt recherche), contre une moyenne de 1,1 % du PIB dans l’Union européenne (1,4 % en Allemagne). Cette dernière comparaison semble plus pertinente que celle de la seule recherche fondamentale car il n’est pas sûr que la distinction entre recherche fondamentale et recherche appliquée soit faite de la même façon dans tous les pays.

Enfin, les intérêts de la dette publique représentaient 2,0 % du PIB en France contre une moyenne de 1,7 % dans l’Union européenne et 0,7 % du PIB en Allemagne mais 4,4 % en Italie.

B) Zooms sur quelques fonctions

1) Les dépenses de santé

Les dépenses publiques hospitalières sont plus élevées en France (3,7 % du PIB) que dans l’Union européenne (3,2 %), en Allemagne (2,8 %) et en Italie (2,9 %). Il en est de même des services ambulatoires (3,2 % du PIB en France contre 2,3 % dans l’Union européenne, 2,3 % en Allemagne et 2,6 % en Italie), des produits médicaux (1,5 % du PIB en France contre 1,1 % dans l’Union européenne avec un fort écart entre l’Allemagne et l’Italie) et des prestations en espèces (3,1 % du PIB en France contre 2,8 % dans l’Union européenne, avec de nouveau un fort écart entre l’Allemagne et l’Italie). Une part plus importante des dépenses de santé n’est pas ventilée en Allemagne.

Les dépenses de santé en % du PIB en 2022

 

France

Union européenne

Allemagne

Italie

Hôpitaux

3,7

3,2

2,8

2,9

Services ambulatoires

3,2

2,3

2,3

2,6

Médicaments et autres produits

1,5

1,1

1,8

0,9

Prestations en espèces (*)

3,1

2,8

3,4

1,8

Santé publique

0,5

0,5

0,8

0,5

Autres ou non ventilées

0,2

0,6

0,8

0,2

Total

12,2

10,5

11,9

8,9

Source : Eurostat ; FIPECO. (*) indemnités journalières pour maladie, allocations pour les handicapés…

2) L’enseignement

Les dépenses publiques d’enseignement sont plus élevées en France dans le secondaire (2,2 % du PIB contre 1,7 % dans l’Union européenne, 1,6 % en Allemagne et 1,8 % en Italie) ainsi que pour les services annexes (services académiques, cantines…). En revanche, les dépenses sont plus faibles en France dans le primaire (1,4 % du PIB contre 1,6 % dans l’Union européenne) et dans le supérieur (0,7 % du PIB contre 0,8 % dans l’Union européenne et en Allemagne mais 0,3 % en Italie).

Les dépenses affectées à l’enseignement en % du PIB en 2022

 

France

Union européenne

Allemagne

Italie

Elémentaire et primaire

1,4

1,6

1,4

1,5

Secondaire

2,2

1,7

1,6

1,8

Supérieur

0,7

0,8

0,8

0,3

Services annexes

0,7

0,3

0,4

0,2

Autres ou non ventilés

0,2

0,3

0,3

0,3

Total

5,2

4,7

4,5

4,1

Source : Eurostat ; FIPECO.

3) La sécurité intérieure et la justice

Les dépenses publiques affectées à la sécurité intérieure et à la justice sont à peu près identiques en France, dans l’Union européenne et en Allemagne pour les principales fonctions : police et gendarmerie, protection civile, tribunaux et administration pénitentiaire. Elles sont plus élevées en Italie s’agissant des forces de l’ordre.

Les dépenses affectées à la sécurité intérieure et à la justice en % du PIB en 2022

 

France

Union européenne

Allemagne

Italie

Police gendarmerie

0,9

0,9

0,8

1,1

Protection civile

0,3

0,2

0,3

0,2

Tribunaux

0,3

0,3

0,4

0,3

Administration pénitentiaire

0,2

0,2

0,1

0,2

Total

1,7

1,7

1,7

1,8

Source : Eurostat ; FIPECO.

C) Conclusion

Les dépenses publiques de la France représentaient 58,3 % du PIB en 2022 contre une moyenne de 49,6 % dans l’Union européenne.

Le poids des dépenses publiques, en pourcentage du PIB, est plus élevé en France que dans l’Union européenne pour toutes les fonctions à l’exception des transports et de la sécurité intérieure et de la justice.

L’écart entre la France et la moyenne européenne est plus particulièrement important pour les fonctions retraites (2,5 points de PIB), santé (1,7 point) et logement (0,7 point).

Cette note présente aussi des zooms sur trois grandes fonctions : la santé, l’enseignement et la sécurité intérieure et la justice.

Il apparait que les dépenses de santé sont plus élevées en France que dans l’Union européenne dans tous les domaines autres que la santé publique : hôpitaux, services ambulatoires, produits médicaux et indemnités en espèces.

Si les dépenses publiques sont nettement plus importantes en France dans l’enseignement secondaire, elles sont un peu plus faibles dans le primaire et dans le supérieur.

Les dépenses sont du même ordre de grandeur en France et dans l’Union européenne pour les forces de police, la protection civile, les tribunaux et l’administration pénitentiaire.

 

[1] Dans les publications d’Eurostat, seule une partie des dépenses de santé est incluse dans la fonction « protection sociale » (les prestations en espèces), les autres étant regroupées dans une fonction spécifique « santé ». Dans cette note, toutes les dépenses liées à la santé et l’invalidité sont comprises dans la fonction protection sociale.

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