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FIPECO le 01.10.2016                    

Les fiches de l’encyclopédie           III) Programmation et pilotage des finances publiques

13) Les budgets des collectivités locales

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Cette fiche présente d’abord les procédures d’élaboration, de vote et de contrôle des budgets des collectivités territoriales. Elle décrit ensuite comment ils sont présentés, avant de préciser en quoi consiste la « règle d’or », ou « d’équilibre réel », que ces budgets doivent respecter. Enfin, le traitement particulier de l’amortissement des immobilisations non financières et des provisions pour risques est précisé.

Elle porte sur les « budgets principaux » des collectivités territoriales dont se distinguent les « budgets annexes » de certains services spécialisés, souvent industriels et commerciaux, tels que l’assainissement et la distribution d’eau. Ces budgets annexes sont votés avec les budgets principaux mais ne sont pas consolidés avec eux, bien que les services concernés n’aient pas de personnalité propre (gestion dite en « régie »).

Les comptes des collectivités territoriales font l’objet d’une fiche distincte qui présente notamment leurs principales caractéristiques, leur agrégation au niveau national et leurs fragilités.

A)   Les procédures budgétaires

La préparation et la présentation du budget sont de la responsabilité de l’exécutif de la collectivité (maire, président du conseil départemental ou régional).

Un « débat d’orientation budgétaire » doit être tenu par l’assemblée locale dans les deux mois qui précèdent le vote du budget sur la base d’un rapport d’orientation budgétaire présenté par l’exécutif. Si le code général des collectivités locales en précise peu le contenu, le juge administratif considère que l’assemblée délibérante doit disposer d’une information précise et détaillée, par exemple sur l’évolution envisagée des taux d’imposition ou sur les principaux projets d’investissement.

Le « budget primitif », le premier pour l’exercice considéré, doit être voté avant le 15 avril. Avant qu’il ne soit voté, l’exécutif peut recouvrer les impôts et engager les dépenses de fonctionnement, dans la limite du budget précédent, ainsi que les dépenses d’investissement, mais avec l’autorisation de l’assemblée locale et dans la limite du quart du budget précédent.

Cette date tardive d’adoption du budget tient au fait que les services locaux de la direction générale des finances publiques (DGFIP) doivent avoir communiqué à la collectivité les principales dotations de l’Etat et l’évolution prévisionnelle des bases de ses impôts locaux. Or les dotations de l’Etat doivent préalablement avoir été votées en loi de finances et réparties par le « comité des finances locales ». Les délais nécessaires ont toutefois, en pratique, été raccourcis et, hors années électorales, les budgets primitifs sont de plus en plus souvent votés avant fin janvier.

L’assemblée locale approuve d’abord la section de fonctionnement puis la section d’investissement (cf. ci-dessous). A l’intérieur de chaque section, les dépenses sont votées, selon la nomenclature retenue (cf. ci-dessous), par chapitre, correspondant à leur nature, ou par fonction.

Si le budget n’est pas voté dans les délais légaux, s’il est voté en déséquilibre ou si le compte de l’exercice précédent fait apparaître un déficit significatif, le préfet saisit la chambre régionale des comptes qui lui propose des mesures de rétablissement de l’équilibre budgétaire. Sur la base de ces propositions, il peut régler lui-même le budget de la collectivité défaillante.

Saisie par le préfet, le comptable public ou toute personne intéressée, la chambre régionale des comptes peut aussi constater qu’une dépense obligatoire n’a pas été inscrite au budget et mettre en demeure la collectivité de l’y inscrire. Si cette mise en demeure n’est pas suivie d’effet, elle propose un budget rectifié au préfet qui le rend exécutoire.

En cours d’année, peuvent être votés des budgets « supplémentaires » ou « rectificatifs » qui modifient substantiellement les prévisions de recettes ou les dépenses autorisées ainsi que leur équilibre général. L’assemblée locale peut aussi prendre des « décisions modificatives » qui autorisent l’exécutif à percevoir des recettes ou engager des dépenses supplémentaires mais dont la portée est plus limitée que celle des budgets supplémentaires.

B)   La présentation des budgets locaux

Les collectivités locales ont une comptabilité générale, ou « d’exercice » ou encore « patrimoniale », ce qui signifie que les produits et charges sont rattachés à l’exercice au cours duquel sont émis les « titres » permettant de recouvrer les créances et les « mandats » donnant ordre au comptable de payer les dépenses. Une « comptabilité de caisse » ne retiendrait que les produits et charges encaissés ou décaissés au cours de l’année considérée.

Le budget est lui aussi un budget « d’exercice » et doit donc autoriser et prévoir les produits et charges rattachés à l’exercice concerné, qui comprennent des « produits et charges calculés » tels que les dotations aux amortissements et aux provisions ou encore les reprises de provisions.

Enfin, le budget d’un exercice donné doit inclure les « restes à réaliser », c’est-à-dire les dépenses engagées au cours de l’exercice précédent mais non mandatées et les recettes certaines de l’exercice précédent qui n’ont pas donné lieu à l’émission d’un titre.

Les budgets doivent être accompagnés de diverses annexes.

1)    Les sections de fonctionnement et d’investissement

Les budgets des collectivités locales sont présentés en distinguant une section de fonctionnement et une section d’investissement.

La « section de fonctionnement » regroupe toutes les dépenses nécessaires au fonctionnement de la collectivité (rémunérations, achats de services, intérêts, dotations aux provisions…) ainsi que ses recettes courantes (produits des impôts, ventes de services, dotation globale de fonctionnement reçues de l’Etat, produits financiers, reprises de provisions…).

La section de fonctionnement comprend des produits et charges qui ne donnent pas lieu à des mouvements de caisse (notamment les dotations aux provisions et aux amortissements et les reprises de provision) et des produits et charges « réels » (les autres). Le solde des produits et charges réels est appelé « autofinancement » ou « épargne brute ». Le solde de l’ensemble des produits et charges est « l’excédent, ou le déficit, de fonctionnement ».

La « section d’investissement » retrace les opérations de nature patrimoniale, soit : en dépenses, les dépenses d’équipement de la collectivité, les subventions d’investissement qu’elle verse, et aussi le remboursement du capital des emprunts contractés dans le passé ; en recettes, l’épargne brute, les subventions d’investissement reçues, la dotation de l’Etat compensant le coût de la TVA sur les investissements et aussi les nouveaux emprunts de l’exercice.

La section d’investissement comprend à la fois des recettes et dépenses non financières (équipements, subventions d’équipement…) et des recettes et dépenses financières (emprunts et remboursements d’emprunts). Elle est équilibrée par la variation du fonds de roulement qui regroupe les opérations financières à moins d’un an, lesquelles ne sont pas détaillées.

Exemple illustratif et simplifié de section de fonctionnement (M€)

Dépenses réelles de fonctionnement (1)

dont :

Achats et charges externes

Frais de personnel

Interventions

80

15

30

30

Recettes réelles de fonctionnement (2)

dont :

Impôts locaux

Autres impôts

Concours de l’Etat

100

40

20

30

Epargne brute (3) = (2) – (1)

20

Dotations amortissements (4)

Dotations provisions (5)

5

5

 Reprises provisions (6)

3

Excédent de fonctionnement (7=3+6-4-5)

13

Source : FIPECO.

Exemple illustratif et simplifié de section d’investissement (M€)

Epargne brute (7)

20

Subventions d’équipement versées (8)

3

Subventions d’équipement reçues (11)

2

Dépenses d’équipement (9)

18

Remboursements d’emprunts (10)

10

Nouveaux emprunts (12)

12

Variation fonds de roulement (13=7+11+12-8-9-10)

3

Source : FIPECO.

2)    La nomenclature des dépenses et recettes

Les grandes collectivités ont le choix de privilégier une présentation de leur budget par nature de dépenses et recettes (frais de rémunération, achats de biens et services…) ou par fonction (éducation, action sociale, voierie…), une ventilation selon l’autre nomenclature étant jointe en annexe.

Les communes de moins de 10 000 habitants doivent présenter leur budget par nature de dépenses et recettes. En pratique, c’est aussi le cas de la plupart des grandes collectivités, à l’exception des régions, bien qu’elles aient le choix.

C)    La règle d’or ou d’équilibre réel

L’article L1612-4 du code général des collectivités territoriales précise que le budget est voté en « équilibre réel » et précise la signification de cette expression :

  • la section de fonctionnement doit d’abord être votée en équilibre ou en excédent ;
  • la section d’investissement doit également être votée en équilibre, mais elle comporte les nouveaux emprunts parmi ses recettes et cet équilibre peut donc être obtenu en contractant de nouvelles dettes ;
  • le remboursement du capital des annuités d’emprunts à échoir dans l’année doit être couvert par la somme de l’épargne brute et des subventions d’investissement reçues (y compris dotations du fonds de compensation de la TVA).

En conséquence, les nouveaux emprunts ne peuvent pas servir à rembourser les anciens et ne peuvent financer que les dépenses d’équipement de la collectivité ou les subventions d’investissement qu’elle verse à d’autres organismes.

Certains élus locaux sont parfois surpris de constater un « déficit » des collectivités locales en comptabilité nationale, alors que leurs budgets sont votés « en équilibre » et que les comptes sont généralement proches de cet équilibre.

Ce déficit en comptabilité nationale est en fait un « besoin de financement », son appellation exacte, qui correspond à peu près au solde des recettes et dépenses « réelles » non financières. Il est possible de le reconstituer approximativement en retenant :

  • soit la variation d’endettement (nouveaux emprunts – remboursement des anciens emprunts) ;
  • soit la différence entre  l’épargne brute et les recettes d’investissement hors emprunts, d’un côté, et les dépenses d’investissement hors remboursements d’emprunts d’un autre côté.

D)   Le traitement des amortissements et provisions

L’inscription de dotations importantes aux amortissements et provisions pourrait dégrader sensiblement le solde de la section de fonctionnement, sauf à augmenter les impôts locaux. En conséquence, le champ des immobilisations qui doivent être amorties et des risques qui doivent être provisionnés est limité par les instructions budgétaires et comptables appliquées aux collectivités locales, notamment pour les communes.

L’amortissement des immobilisations est intégralement facultatif pour les communes et groupements de communes de moins de 3 500 habitants. Au-delà de ce seuil, il est obligatoire pour les biens meubles hors œuvres d’art, les biens immeubles productifs de revenus et non affectés au service public, ainsi que les immobilisations incorporelles. Au total, selon un rapport de mai 2016 de l’inspection générale des finances, les obligations d’amortissement des communes portent sur moins de 7 % de leur patrimoine. 

La liste des dérogations au principe de l’amortissement[1] est plus réduite pour les régions et départements, qui disposent néanmoins de la faculté de « neutraliser » budgétairement une partie de ces dotations obligatoires.

En effet, en sus de ces possibilités de dérogation aux principes comptables d’amortissement des immobilisations et de provisionnement des risques, les collectivités locales sont autorisées à inscrire dans les budgets et les comptes des « recettes d’ordre » égales aux dotations aux amortissements et provisions dont elles visent la « neutralisation budgétaire ».


[1] Le gouvernement les a étendues encore plus dans le cadre de mesures de soutien de l’investissement en 2015.

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