22/10/2025
La redistribution entre les ménages selon leur lieu de résidence
François ECALLE
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L’Insee a publié le PIB et la valeur ajoutée des principales branches et une décomposition du revenu disponible des ménages par région en 2022. Ces données permettent d’estimer les transferts nets opérés en faveur, ou en défaveur, des habitants de chacune des régions françaises à travers, d’une part, les prestations sociales en espèces qu’ils reçoivent et les principaux services publics mis à leur disposition et, d’autre part, les cotisations sociales et les impôts directs qu’ils payent. Ces données régionales sont fragiles et les résultats doivent être pris avec précaution, mais le calcul de ces transferts nets par habitant donne un ordre de grandeur raisonnable de la redistribution entre les ménages selon leur région de résidence.
Il apparaît un transfert net de 4 400 € en faveur de chaque habitant en moyenne pour l’ensemble des régions. En effet, les dépenses publiques comprises dans cet indicateur de la redistribution (prestations sociales et coût de fonctionnement des services publics) sont financées non seulement par les cotisations sociales et les impôts directs sur les ménages, retenus dans cet indicateur, mais aussi par les impôts indirects (TVA…), les impôts sur les entreprises et l’endettement public, qui ne sont pas pris en compte ici. Le montant des transferts nets reçus par les ménages de chaque région ne doit donc pas être apprécié dans l’absolu mais par comparaison avec cette moyenne de 4 400 € par habitant.
La Martinique, la Guadeloupe et La Réunion sont les régions pour lesquelles les transferts nets en faveur des ménages sont les plus élevés (plus de 8 000 € par habitant). La moyenne des cinq régions ultramarines (8 400 €) est nettement au-dessus de la moyenne nationale (4 400 €). Les impôts directs y sont bien plus faibles que la moyenne nationale.
En métropole, les régions dont les ménages reçoivent les transferts nets les plus importants (plus de 6 000 € par habitant) sont dans l’ordre : la Corse, la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie, la Bourgogne-Franche-Comté, la Bretagne et la Normandie.
L’Ile-de-France est la seule région pour laquelle les transferts nets en faveur des ménages sont négatifs (- 1 600 € par habitant). Les impôts sur les ménages et les cotisations sociales y sont beaucoup plus importants que la moyenne nationale.
Les régions pour lesquelles ces transferts nets sont les plus faibles, tout en étant positifs, sont Auvergne-Rhône-Alpes (3 900 € par habitant), Grand-Est (4 800 €) et Pays de Loire (5 000 €).
Les transferts nets reçus par les ménages sont donc très différents d’une région à l’autre, ce qui peut avoir diverses causes que cette note ne cherche pas à identifier. Il est néanmoins très probable que le niveau de vie et la répartition par âge de la population expliquent une grande partie de ces différences. En tout état de cause, ces transferts nets entre les ménages, qui sont à l’image des disparités de richesses, traduisent bien une forme de solidarité et de redistribution entre les régions, notamment depuis l’Ile-de-France et vers l’Outre-mer.
Une étude de l’Insee sur la redistribution entre les ménages selon la taille de leur unité urbaine de résidence confirme que seuls les ménages de l’agglomération parisienne sont contributeurs nets à cette redistribution.
A) La méthode
L’Insee publie, pour chaque région française, une décomposition du revenu disponible brut des ménages qui résident dans ces régions : les revenus primaires (salaires, excédent brut d’exploitation des indépendants, revenus du capital financier et foncier), les cotisations sociales, les prestations sociales en espèces et les impôts directs sur les revenus et le patrimoine des ménages (impôt sur le revenu au sens strict, CSG et CRDS, prélèvements sociaux sur les revenus du capital, taxe d’habitation, taxes foncières, ISF/IFI).
L’Insee publie également, pour chaque région, la valeur ajoutée de la branche « administration publique, enseignement, santé humaine et action sociale » qui correspond à une partie du coût (la masse salariale pour l’essentiel) des principaux services publics (notamment l’éducation et les hôpitaux) à ce niveau géographique, même si cette branche comprend des organismes privés (sociétés et associations ayant ces activités à titre principal). Certains services publics se trouvent dans d’autres branches (par exemple « activités scientifiques et techniques, services administratifs et de soutien »).
Pour chaque région est ici calculé un transfert net en faveur de ses habitants égal à la différence entre, d’un côté, les prestations sociales qu’ils reçoivent et cette estimation du coût des services publics mis à leur disposition et, d’un autre côté, les cotisations sociales et les impôts directs sur les revenus et le patrimoine qu’ils payent. Ces transferts nets sont rapportés au nombre d’habitants de chaque région pour pouvoir les comparer.
Certaines dépenses publiques pouvant avoir un impact redistributif entre régions ne sont pas intégrées, comme les subventions de l’Etat aux opérateurs de transport public local ou aux centres de recherche.
Il apparaît un transfert net moyen de 4 400 € par habitant (300 Md€) pour l’ensemble de la France. En effet, les dépenses publiques comprises dans cet indicateur, même si elles ne sont pas exhaustives, sont financées non seulement par les cotisations sociales et les impôts directs sur les ménages mais aussi par les impôts indirects (TVA…), les impôts sur les entreprises et l’endettement public, qui ne sont pas pris en compte ici. Le montant des transferts nets reçus par les ménages de chaque région ne doit donc pas être apprécié dans l’absolu mais par comparaison avec cette moyenne.
Ces données régionales sont plus fragiles que les comptes nationaux et doivent être pris avec précaution.
Sous cette réserve, les transferts nets reçus par les ménages sont très différents d’une région à l’autre, ce qui peut avoir diverses causes que cette note ne cherche pas à identifier. On observera seulement que les principales prestations sociales en espèces sont les pensions de retraite et que les services publics éducatifs et hospitaliers sont parmi les plus importants. En conséquence la démographie particulière de chaque région explique sans doute une part importante de ces différences. Le poids des impôts directs dans certaines régions tient sans doute beaucoup à un niveau de vie plus élevé. Les transferts nets en faveur des régions insulaires peuvent aussi être liés à leurs difficultés économiques et sociales.
En tout état de cause, ces transferts nets en faveur des ménages traduisent bien une forme de solidarité et de redistribution entre les régions. L’année 2022 est la plus récente pour laquelle les données nécessaires à leur estimation ont été publiées par l’Insee.
B) Les résultats
La Martinique, la Guadeloupe et la Réunion sont les régions pour lesquelles les transferts nets en faveur des ménages sont les plus élevés (plus de 8 000 € par habitant). La moyenne des cinq régions ultramarines (8 400 €) est nettement au-dessus de la moyenne nationale (4 300 €).
En métropole, les régions dont les ménages reçoivent les transferts nets les plus importants (plus de 6 000 € par habitant) sont dans l’ordre : la Corse, la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie, la Bourgogne-Franche-Comté, la Bretagne et la Normandie.

Source : Insee, FIPECO. Les transferts nets en faveur des ménages sont égaux à la différence entre les prestations sociales et le coût des services publics, d’un côté, et les impôts directs sur les ménages et les cotisations sociales, de l’autre côté. Le transfert net moyen pour l’ensemble de la France (4 400 € par habitant) est financé par les impôts indirects, les impôts sur les entreprises et l’endettement, qui ne sont pas pris en compte dans cette mesure de la redistribution entre les régions.
L’Ile-de-France est la seule région pour laquelle les transferts nets en faveur des ménages sont négatifs (- 1 600 € par habitant).
Les régions pour lesquelles ces transferts nets sont les plus faibles, tout en étant positifs, sont Auvergne-Rhône-Alpes (3 900 € par habitant), Grand-Est (4 800 €) et Pays de Loire (5 000 €).
Le tableau suivant décompose ces transferts nets pour les principaux ensembles géographiques que sont l’Ile-de-France, la métropole hors Ile-de-France, les DOM et la France entière.
L’Ile-de-France est caractérisée par des prestations sociales inférieures et des services publics supérieurs à la moyenne nationale, ce qui peut tenir à une part de retraités plus faible pour ce qui concerne les prestations sociales. Les impôts sur les ménages et les cotisations sociales y sont bien plus importants que la moyenne, ce qui reflète un niveau de vie plus élevé et des emplois plus qualifiés.
La métropole hors Ile-de-France a des caractéristiques symétriques de celles de l’Ile-de-France : des prestations sociales supérieures à la moyenne nationale mais des services publics, des cotisations et des impôts inférieurs à la moyenne.
Les régions ultramarines sont caractérisées par des prestations sociales plus faibles que la moyenne nationale, ce qui peut tenir à une part plus faible de retraités dans la population. Les cotisations sociales y sont également plus faibles. Les services publics y sont un peu plus importants que dans l’ensemble de la France. Le poids des impôts directs sur les ménages y est surtout beaucoup plus faible, ce qui reflète un niveau de vie inférieur à la moyenne nationale.
Les transferts nets en faveur des ménages par zone géographique en euros par habitant
|
Prestations sociales
+
|
Cotisations sociales
-
|
Services publics
+
|
Impôts directs sur les ménages
-
|
Transferts nets
|
Ile-de-France
|
7 700
|
11 500
|
9 000
|
6 800
|
- 1600
|
Métropole hors Ile-de-France
|
8 600
|
6 900
|
7 200
|
3 400
|
5 600
|
Outre-mer
|
5 000
|
3 700
|
8 400
|
1 300
|
8 400
|
France entière
|
8 300
|
7 600
|
7 600
|
3 900
|
4 400
|
Source : Insee ; FIPECO.
L’Insee a publié en 2023 une analyse de la redistribution au sens large, incluant les services publics et tous les prélèvements obligatoires, entre les ménages selon la taille de leur unité urbaine de résidence (sur la base des revenus de 2019). Il en ressort que seuls les ménages de l’agglomération parisienne sont contributeurs nets à la redistribution des revenus. Les ménages des agglomération de 200 000 à 2 000 000 habitants sont légèrement bénéficiaires. Ceux des autres unités urbaines et ceux qui vivent hors des unités urbaines sont largement bénéficiaires.