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17/03/2022

Les prélèvements sur le travail, le capital et la consommation de 2016 à 2020

François ECALLE

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Les économistes distinguent souvent les prélèvements obligatoires (PO) sur la consommation et sur les deux « facteurs de production » que sont le travail et le capital. La ventilation des PO entre ces trois assiettes économiques pose des problèmes méthodologiques délicats qui sont présentés dans les fiches techniques de ce site relatives aux prélèvements sur le travail et sur le capital. Elle est néanmoins opérée chaque année par la Commission européenne, dans le cadre de son rapport sur les tendances de la fiscalité dans l’Union européenne, et ce billet s’appuie sur les dernières statistiques qu’elle a mises en ligne. Il compare les PO en France, en Allemagne, dans la zone euro et l’Union européenne (à 27) en 2020, dernière année connue, et en 2016, dernière année complète du quinquennat précédent.

Le taux des PO en France en 2020 est supérieur de 5,1 points de PIB à celui de la zone euro, de 5,4 points à celui de l’Union européenne et de 5,6 points à celui de l’Allemagne.

Il a baissé de 0,1 point en France de 2016 à 2020 alors qu’il a augmenté dans la zone euro et l’Union européenne (+ 0,4 point), ainsi qu’en Allemagne (+ 0,8 point).

L’écart par rapport aux moyennes communautaires en 2020 résulte pour 1,5 à 2,0 points des prélèvements sur le travail, pour 2,7 points des prélèvements sur le capital et pour 0,6 à 0,9 point des prélèvements sur la consommation.

De 2016 à 2020, les prélèvements sur le travail ont diminué en France alors qu’ils ont augmenté dans la zone euro et l’Union européenne (notamment en Allemagne). Les prélèvements sur le capital ont augmenté en France de 2016 à 2020, malgré les réformes fiscales mises en œuvre sur cette période, alors qu’ils ont diminué dans la zone euro et l’Union européenne (notamment en Allemagne). Les prélèvements sur la consommation ont été stables en France alors qu’ils ont diminué en Europe.

La part des prélèvements sur le travail et sur la consommation dans le total des PO en France est inférieure à la moyenne des pays européens. En revanche, la part des prélèvements sur le capital est plus élevée en France. En Allemagne, la part du travail est nettement plus forte qu’en France, la part du capital est nettement plus faible et la part de la consommation est voisine.

La France est passée du deuxième rang de l’Union européenne pour les prélèvements sur le travail en 2016 au cinquième en 2020 mais elle est restée au premier pour ceux qui sont à la charge des employeurs.

S’agissant des prélèvements sur le capital, la France est passée du premier rang en 2016 au deuxième rang en 2020, derrière le Luxembourg et loin devant l’Allemagne. Elle est au premier rang pour les impôts sur le stock de capital en 2020.

Elle est au 16ème rang pour les prélèvements sur la consommation en 2020 comme en 2016, et au 19ème pour la seule TVA (18ème en 2016).

Les prélèvements opérés sur chacune de ces assiettes sont de nature assez hétérogène (impôts et cotisations sociales, impôts généraux et taxes spécifiques, prélèvements sur les flux et les stocks…). Ce panorama appelle donc des analyses plus fines qui feront l’objet d’autres notes.

A) La répartition des prélèvements par assiette économique

1) Les prélèvements par assiette en pourcentage du PIB

Le taux des prélèvements obligatoires (PO) estimé pour la France en 2020 par la Commission européenne (45,6 %) n’est pas exactement le même que celui estimé par l’Insee (44,5 %) en raison notamment d’un traitement différent des crédits d’impôts[1]. Il est supérieur de 5,1 points de PIB à celui de la zone euro, de 5,4 points à celui de l’Union européenne et de 5,6 points à celui de l’Allemagne.

Le taux des prélèvements obligatoires a baissé de 0,1 point en France de 2016 à 2020 alors qu’il a augmenté en moyenne dans la zone euro (+ 0,4 point) et l’Union européenne (+ 0,4 point), ainsi qu’en Allemagne (+ 0,8 point).

Le taux des PO a augmenté dans la plupart des pays de 2019 à 2020 (de 0,3 point en France comme dans l’Union européenne) car leur produit a moins diminué que la valeur du PIB, certains impôts étant peu sensibles à la conjoncture.

L’écart par rapport aux moyennes communautaires en 2020 résulte pour 1,5 à 2,0 points des prélèvements sur le travail, pour 2,7 points des prélèvements sur le capital et pour 0,6 à 0,9 point des prélèvements sur la consommation.

Les prélèvements obligatoires par assiette économique en % du PIB

Prélèvements

France

Allemagne

Zone euro

Union européenne

2016

2020

2016

2020

2016

2020

2016

2020

Total

45,7

45,6

39,2

40,0

40,1

40,5

39,8

40,2

Travail

24,0

23,5

22,0

23,9

20,9

21,9

20,5

21,5

Capital

10,3

10,7

6,9

6,5

8,4

8,1

8,1

7,9

Consommation

11,4

11,4

10,3

9,7

10,9

10,5

11,1

10,8

SoSource : Commission européenne ; FIPECO.urce : Commission européenne ; FIPECO.

De 2016 à 2020, les prélèvements sur le travail ont diminué en France, en raison de la substitution de la CSG à des cotisations salariales et du remplacement du CICE (considéré comme une dépense publique par Eurostat comme tous les crédits d’impôt) par un allègement de cotisations patronales, alors qu’ils ont augmenté dans la zone euro et l’Union européenne (plus fortement en Allemagne).

Malgré les réformes fiscales récentes (remplacement de l’ISF par l’IFI, baisse du taux de l’IS, prélèvement forfaitaire unique sur les revenus des placements financiers…), les prélèvements sur le capital ont augmenté en France de 2016 à 2020, sous l’effet par exemple d’une hausse des impôts sur l’immobilier (+ 4,0 Md€ pour les droits de mutation à titre onéreux et + 3,8 Md€ pour les taxes foncières) et des droits sur les successions et donations (+ 2,7 Md€). Ils ont même augmenté en pourcentage du PIB alors qu’ils ont diminué dans la zone euro et l’Union européenne (notamment en Allemagne). 

L’assiette, et donc le rendement, des impôts sur la transmission et la détention du capital (droits de mutation, taxes foncières…) a beaucoup augmenté en France du fait notamment de la hausse du prix des actifs. Des évolutions semblables de ces prix ont eu lieu dans les autres pays européens et ont sans doute eu le même effet, mais les prélèvements sur la détention et la transmission du capital sont plus importants en France (cf. plus loin).

Les données d’Eurostat font aussi apparaître une augmentation des prélèvements sur les revenus du capital en pourcentage du PIB. D’une part, la création d’un prélèvement forfaitaire unique a entraîné une forte hausse des dividendes et finalement une augmentation du produit de leur imposition. D’autre part, malgré la baisse de son taux, le produit de l’impôt sur les sociétés avant crédits d’impôts a sensiblement augmenté selon Eurostat en comptabilité nationale[2].

Les prélèvements sur la consommation ont été stables en France de 2016 à 2020 alors qu’ils ont diminué en Europe.

2) Les prélèvements par assiette en pourcentage du total des prélèvements obligatoires

Les prélèvements par assiette économique en 2020 en % du total

Prélèvements

France

Allemagne

Zone euro

Union européenne

Total

100

100

100

100

Travail

51,5

59,8

54,1

53,5

Capital

23,5

16,3

20,0

19,6

Consommation

25,0

24,3

25,9

26,9

Source : Commission européenne ; FIPECO.

La part des prélèvements sur le travail et sur la consommation dans le total des PO en France est inférieure à la moyenne des pays européens. En revanche, la part des prélèvements sur le capital est plus élevée en France. En Allemagne, la part du travail est nettement plus forte qu’en France, la part du capital est nettement plus faible et la part de la consommation est voisine.

B) Les prélèvements sur le travail

Les prélèvements obligatoires sur le travail représentaient 23,5 % du PIB en France en 2020 contre une moyenne de 21,9 % dans la zone euro et de 21,5 % dans l’Union européenne. La France est passée du deuxième rang de l’Union en 2016 au cinquième en 2020, derrière notamment la Suède et l’Allemagne.

Source : Commission européenne ; FIPECO

La France se distingue encore en 2020 par le poids des prélèvements dont les employeurs sont redevables (12,4 % du PIB) malgré les allègements de cotisations patronales qui ont remplacé le CICE : elle se situe au premier rang, loin devant l’Allemagne (7,3 %) et les moyennes de la zone euro (8,5 %) et de l’Union européenne (7,6 %).

Les prélèvements sur le travail à la charge des employeurs en 2020 (% du PIB)

France

Allemagne

Italie

Espagne

Pays-Bas

12,4

7,3

10,0

10,0

5,7

Belgique

Suède

Zone euro

Union européenne

8,1

11,6

8,8

8,4

Source : Commission européenne ; FIPECO

C) Les prélèvements sur le capital

Les prélèvements obligatoires sur le capital (physique, notamment immobilier, et financier) représentent 10,7 % du PIB en France en 2020 contre une moyenne de 8,1 % dans la zone euro et 7,9 % dans l’Union européenne. La France est passée du premier rang en 2016 au deuxième rang en 2020, derrière le Luxembourg (11,2 % du PIB), où le poids des prélèvements sur le capital reflète l’importance des activités financières, et loin devant l’Allemagne (6,5 %).

Source : Commission européenne ; FIPECO

La France se distingue notamment par le poids des prélèvements sur le stock (détention et transmission) de capital (taxes foncières, droits de succession, ISF/IFI… soit 4,4 % du PIB en 2020) pour lesquels elle se situe au premier rang, comme en 2016. Elle est très loin de l’Allemagne (1,5 %) et loin des moyennes de la zone euro (2,6 %) et de l’Union européenne (2,5 %).

Les prélèvements sur le stock de capital en 2020 (% du PIB)

France

Allemagne

Italie

Espagne

Pays-Bas

4,4

1,5

2,8

3,1

2,0

Belgique

Suède

Zone euro

Union européenne

4,1

1,2

2,6

2,5

Source : Commission européenne ; FIPECO

D) Les prélèvements sur la consommation

Les prélèvements obligatoires sur la consommation représentent 11,4 % du PIB en France en 2020 pour des moyennes de 10,5 % dans la zone euro et de 10,8 % dans l’Union européenne. La France est au 16ème rang de l’Union, comme en 2016. Toutefois, seuls la Suède et les Pays-Bas ont un ratio plus élevé parmi les grands pays comparables. En Allemagne, ces prélèvements ne représentent que 9,7 % du PIB.

Source : Commission européenne ; FIPECO

La TVA est le principal prélèvement sur la consommation. Son rendement rapporté au PIB est en France en 2020 (7,0 %) proche de la moyenne de la zone euro (6,7 %) ou de l’Union européenne (6,9 %). La France est au 19ème rang de l’Union en 2020 après avoir été au 18ème en 2016 mais, parmi les grands pays comparables, seuls la Suède et les Pays-Bas affichent un ratio plus élevé. Si on excepte la Suède, le poids de la TVA ne diffère pas beaucoup entre les grands pays.

La TVA en 2020 (% du PIB)

France

Allemagne

Italie

Espagne

Pays-Bas

7,0

6,6

6,0

6,3

7,3

Belgique

Suède

Zone euro

Union européenne

6,5

9,2

6,7

6,9

Source : Commission européenne ; FIPECO

Les médias suivants ont mentionné ce billet :

Le nouvel Economiste

[1] Ils sont traités comme des dépenses publiques et ne sont donc pas déduits des prélèvements obligatoires par la Commission européenne, alors que l’Insee les en déduit.

[2] L’Insee et Eurostat ne traitent pas de la même façon les crédits d’impôt pour estimer les prélèvements obligatoires.

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